Publié le Mercredi 23 décembre 2020 à 15h56.

SMIC : pas de pitié pour les gueux

Chaque année en cette période est annoncé le montant du SMIC pour l’année à venir. Une fois de plus, pas de scoop. Ce sera des miettes : 15 euros de plus par mois pour les salariéEs à temps plein. Le groupe soigneusement sélectionné d’« experts » chargés de conseiller le gouvernement sur la trajectoire du salaire minimum a une fois de plus proposé une revalorisation a minima de 0,99 %, conformément à la formule de calcul prévue par la loi, soit environ 1 230 euros net par mois.

Et le gouvernement s’y est rallié sans problème, oubliant les discours larmoyants de Macron lors du premier confinement sur ces « travailleurs de la deuxième ligne » qui ont continué à aller bosser au printemps, prenant les transports en commun, affrontant de vrais risques sanitaires pour eux et leurs familles, afin notamment d’approvisionner les magasins considérés comme « essentiels ». Parmi ceux qui sont concernés par le SMIC, il y a beaucoup de temps partiels (30 % d’entre eux sont payés au SMIC) et de femmes (60 % des salariéEs payés au SMIC sont des femmes).

Entre 2009 et 2018, «les versements aux actionnaires du CAC 40 ont augmenté de 70 %, la rémunération des PDG du CAC 40 de 60 %, alors que le salaire moyen au sein de ces entreprises n’a augmenté que de 20 % et le smic de 12 % », pointe l’ONG Oxfam. En 2019, les dirigeants du CAC40 ont touché en moyenne une rémunération de 5 491 258 euros. Le 2 janvier à 5 h 12 du matin, un patron « moyen » du CAC 40 a donc déjà gagné l’équivalent d’un SMIC annuel… Le mieux payé est Bernard Charlès, dirigeant de Dassault Systèmes : il faut environ trois années et huit mois pour qu’un smicard gagne autant que lui en une journée. 2019 et 2020 ont été des années plus compliquées (tous les chiffres ne sont pas encore connus) mais, à ces niveaux, on peut supporter de petites baisses.

Ce qui est fabuleux, mais pas étonnant, c’est la persévérance des économistes officiels. Comme le souligne Michel Husson1 : « Tel un "marronnier", le dernier rapport du groupe d’experts sur le salaire minimum recommande de "s’abstenir de tout coup de pouce sur le SMIC au 1er janvier 2021". Rien de nouveau sous le soleil, puisque les experts n’ont jamais proposé un tel coup de pouce ».

De plus, ajoute Husson : « Le rapport évoque évidemment les effets de la pandémie sur le marché du travail. Il souligne après d’autres que "les semaines de confinement ont affecté plus intensément les salariés proches du SMIC qui se sont retrouvés plus fréquemment en activité partielle ou en inactivité que les autres salariés". Mais de ce constat nos experts ne tirent aucune conclusion, sinon celle-ci : pas de coup de pouce pour les travailleurs "en première ligne" »