Publié le Jeudi 24 juillet 2014 à 20h22.

Flashball : protégeons-nous, désarmons la police !

Ils s’appellent Jiade, Pierre, Joan, Samir, Clément, Nordine, Joachim, Geoffrey ou Florent. Ils ont entre 14 et 35 ans, et font partie de la longue liste des victimes des violences policières ces dix dernières années. Leur seul tort ? Avoir manifesté ou être passé à côté d’une manifestation ou simplement avoir été contrôlés dans la rue. Certains ont perdu un œil, tous ont été gravement blessés par un tir de flashball.

Alors est-ce que ce sera l’occasion de faire le procès du flashball ? Trois policiers viennent d’être renvoyés en correctionnelle au tribunal de Bobigny pour avoir blessé 6 personnes au flashball il y a 5 ans à Montreuil, crevant notamment l’œil de Jérôme Gatti. Depuis sa généralisation il y a 10 ans, le flashball a blessé très gravement au moins 26 personnes (décompte de Mediapart), dont treize ont perdu un œil. Mostapha Ziani est mort à Marseille suite à un tir au thorax. Trois jeunes manifestants ont encore été touchés à l’œil lors de la manifestation contre l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes en février dernier à Nantes. L’un d’eux a perdu définitivement son œil. Tous ces cas s’inscrivent dans le registre des violences policières avec toutes leurs caractéristiques, tentatives de criminaliser les victimes, lenteur des procédures dès que des flics sont en cause et généralement impunité. Un seul policier a été condamné, à du sursis seulement, et il est toujours en fonction. À Bondy en 2009, un policier tire sur un jeune à bout portant en plein cœur lors d’un contrôle d’identité. Le jeune est embarqué au commissariat pour rébellion. C’est là que les policiers constatent la plaie saignante au cœur. La plainte sera classée sans suite par le procureur de Bobigny pour « infraction insuffisamment caractérisée » ! En ce qui concerne les manifestations, la justice se retranche généralement sur le fait que le tireur n’est pas identifié… par la police.

L’arme de la peurCes cas ne sont pas des dommages collatéraux. Les armes dites « non létales » ne sont pas des bulles de savon. Ce sont… des armes qui, par définition, sont faites pour blesser comme les armes létales sont faites pour tuer. Les différents types de flashballs ont été utilisés près de 3 000 fois en 2012 selon un rapport du Défenseur des droits. Les cas recensés par Mediapart ne concernent que les cas de blessures très graves qui ont donné lieu à des plaintes. Pour un œil crevé, combien de lésions aux membres, au dos ou au crâne ? Les armes non létales ont été généralisées sous le prétexte qu’elles permettraient de limiter l’usage d’armes à feu et donc le risque de tuer. Mais l’utilisation du flashball comme celle du taser n’ont en rien réduit le nombre de crimes policiers ces dernières années, dont la majorité ne sont pas dus à l’utilisation d’armes à feu. Elles ont par contre permis de lever le tabou de l’utilisation des armes, ce qui rend l’avenir encore plus dangereux. Car pour le pouvoir leur but est ailleurs. Ces armes sont un des outils (aux côtés des moyens de surveillance et des techniques de répression) pour développer le contrôle et la peur, peur de manifester et peur d’occuper la ville. C’est donc à deux titres que nous devons lutter pour désarmer la police. Pour protéger notre intégrité physique, celle de nos amiEs, de nos voisinEs, de nos camarades. Mais aussi pour défendre notre capacité à défendre une autre ville, une autre vie.

Denis Godard