« Aucun budget autre que celui des armées ne sera augmenté » en 2018 : ainsi se termine la comédie Macron-Villiers. L’armée échappe à l’austérité générale.
Pendant près d’une semaine, radios, télés, journaux ont vendu la fable d’un affrontement entre Macron et l’armée. Et les hommes politiques de pratiquement tous les bords se sont manifestés pour voler au secours de ce pauvre général de Villiers et dénoncer la petite coupe imposée au budget des armées. Jusqu’à Alexis Corbière de La France insoumise qui n’a pas craint d’affirmer que « les conséquences sur l’armée sont intolérables ». Eh bien non, ce qui est intolérable c’est de dépenser autant d’argent pour l’arme atomique, des interventions impérialistes extérieures et des achats aux marchands de canons.
Une petite égratignure vite pansée
Reprenons au début. Dès le début de son mandat, Macron s’était affiché en « chef des armées », rendant sur tous les tons hommage aux militaires et annonçant une forte augmentation des crédits militaires pour les années à venir. Mais un couac intervient pour 2017 : pour rester dans les clous de la règle de déficit budgétaire de 3 %, Macron et Philippe décident de couper dans les dépenses de tous les ministères. Pour un total de 4,5 milliards, mais la discussion se focalise sur les 850 millions pour les armées. De Villiers, le chef d’état-major des armées fait connaître son mécontentement devant la commission de la défense de l’Assemblée nationale. Il y a une fuite : ses propos sont rendus publics. D’où vient-elle ? Peu importe. Macron s’énerve, rappelle qu’il est le « chef » et de Villiers finit par démissionner. Il est remplacé par François Lecointre qui a fait partie de l’opération Turquoise lors du génocide au Rwanda.
L’énervement de Macron renvoie à la psychologie du personnage ou bien à un calcul plus politique : montrer que, contrairement à son prédécesseur, il n’est pas un président sur les pieds duquel on marche. Mais, dès le départ de de Villiers, il s’emploie sur la base d’Istres à faire la cour aux militaires. L’engagement de porter le budget militaire à 2 % du PIB en 2025 sera tenu et, en 2018, assure-t-il, «le budget des armées sera porté à 34,2 milliards d’euros», soit une rallonge de 1,5 milliard d’euros. Ce n’est pas négligeable (même si certains commencent déjà à marmonner que c’est insuffisant) alors que 20 milliards d’économies sont annoncés pour 2018 afin de compenser les multiples allègements d’impôts annoncés pour les entreprises et les grandes fortunes. Quelques jours plus tard, la ministre des Armées, Florence Parly, annonçait le « dégel », dès 2017, de 1,2 milliard d’euros.
Le nucléaire sécurisé
Macron écarte en particulier toute idée d’économie sur le nucléaire : « la dissuasion nucléaire est au cœur de notre défense ». Le lien avec « la lutte contre le terrorisme » qui, depuis 2015, sert d’argument à la hausse du budget militaire, n’est pas évident…. Les industriels de l’armement sont rassurés, même si quelques programmes seront décalés en 2017 : la Direction générale de l’armement (DGA) achète chaque année pour quelque 10 milliards d’euros de matériels.
Au-delà du clapotis de ces derniers jours, la politique militaire des classes dominantes en France est confortée. Celle d’un impérialisme de second rang qui utilise l’instrument militaire (force de frappe nucléaire et multiplication des coûteuses interventions extérieures) pour se hausser du col sur la scène internationale et compenser, face notamment à l’Allemagne, le recul de ses industries autres que militaire.
Henri Wilno