La Journée mondiale de lutte contre la maltraitance des personnes âgées du 15 juin a révélé une recrudescence des maltraitances des adultes âgés. Pendant longtemps, cette maltraitance a été sous-estimée, ainsi que la place de vie de nos aînés.
L’affaire de la maison de retraite à Bayonne a relancé la question de la maltraitance des personnes âgées. Rappelons qu’on y avait découvert que les pensionnaires recevaient des coups, étaient sous alimentés et privés d'hygiène.
Selon Pascal Champvert, président de l'Association des directeurs au service des personnes âgées (AD-PA), «il y a un mépris dans nos sociétés occidentales pour les vieux, surtout lorsqu’ils sont affaiblis, handicapés ou malades» (L’Humanité du 24 octobre).
Ces violences peuvent prendre des formes différentes, allant de la violence physique (des coups, brûlures ou ligotage), morale (un langage irrespectueux) ou encore matérielle (escroqueries diverses) à de la négligence active ou passive. Selon une étude récente, les lieux identifiés de maltraitance seraient à 38 % les institutions, 17% les centres d'aide par le travail (CAT), 13% les foyers. Cette violence touche les personnes vulnérables : les enfants et adultes handicapés et les personnes âgées.
Appels en forte progression
Les signalements de maltraitance sont en augmentation. Le 3977, numéro d’appel d’urgence pour améliorer le signalement de la maltraitance des personnes âgées et des personnes handicapées, compte plus de 12300 appels en trois mois. La maltraitance envers les personnes âgées et handicapées apparaît de plus en plus au grand jour, un tabou semble être levé. 72 % des appels proviennent de femmes qui évoquent notamment la maltraitance à domicile. Les victimes sont des femmes âgées de 76 à 90 ans et 54% des auteurs sont des hommes. Ils auraient entre 41 ans et 61 ans. Les personnes en situation de handicap téléphonent depuis leur lieu travail et se plaignent de brimades, injures et non reconnaissance de leur handicap Les syndicats s’investissent peu dans ce domaine. 25 % des appels proviennent des professionnels de terrain qui se trouvent démunis face à des situations de maltraitance. La plate forme, qui comprend l'Alma, dédiée aux personnes âgées, s’est ouverte aux personnes handicapées.
Un défi démocratique
Pour un maintien à domicile il faut mettre l’accent sur les aidants familiaux ou employés, et leur formation. Ces aidants, quand ils sont familiaux, doivent aussi pouvoir concilier leur vie privée et professionnelle. Il faut également développer les structures en institutions. Sur le maintien à domicile, il faut créer des structures à taille humaine pour permettre aux personnes âgées de résider dans des logements privatifs et instaurer un débat «sur l’opportunité d’assortir le congé des aidants familiaux d’une compensation de la perte de salaire», dixit Michel Coquillion, vice-président de la CFTC.Il est plus que temps d’améliorer la prise en charge des personnes qui résident dans des structures hospitalières. Pascal Champvert s’interrogeait, le 6 mars dernier, dans le journal La Croix : «Comment notre pays va financer son retard en matière d’aide aux personnes âgées ?» De la même manière, Joëlle Le Gall, présidente de la Fédération nationale des associations de personnes Âgées et de leurs familles (Fnapaef), réclamait dans Le Parisien la création immédiate de 40 000 places dans les établissements. Selon ces associations, tout repose sur les familles et non la solidarité nationale.D’autre part, L’Humanité du 6 mars dernier relatait déjà la maltraitance dont sont victimes les personnes âgées dans certaines maisons de retraite. 50 % des personnes âgées hospitalisées et 30 % des résidents des maisons de retraite sont mal nourris. En effet, à la source on trouve une accumulation d’inattentions s’apparentant à des maltraitances : préjugés alimentaires qui conduisent à la prescription de régimes trop sévères, horaires inadaptés (repas parfois servi à 17h30), effet anorexigène de la distribution des médicaments, etc. Des patients handicapés ont des difficultés pour mastiquer, ce qui conduit à un effet buccal déplorable. Des dentistes pourraient pourtant facilement intervenir en amont. Quand on rentre dans la peau d’une personne âgée, «on perd ses repères, raconte D.B. S’asseoir dans un fauteuil pour nouer ses chaussures, descendre un escalier, ouvrir une boite de médicament, décapsuler un comprimé, se coiffer, tous ces gestes simples deviennent difficiles voire impossibles.»
Si le degré de civilisation d’une société se mesure à ses engagements envers les plus vulnérables, il est plus que temps de s’intéresser à ce problème pour le résoudre le plus rapidement possible.
Martine Lozano, militante associative