Résolution politique générale adoptée par la réunion nationale du courant Convergences et alternative, le 9 mai 2010.
Les résultats des élections régionales de mars dernier, qui ont retenti comme une belle claque politique pour le pourvoir sarkozien et ouvert une situation totalement nouvelle à gauche, renforcent encore plus la nécessité et l’urgence de construire l’unité sociale et politique de la gauche de transformation sociale, enjeu crucial si l’on veut construire des résistances à la droite et fournir une alternative à la politique du Parti socialiste. L’absence d’unité électorale complète entre toutes les composantes de la gauche de transformation a affaibli ses résultats globaux. Mais ces derniers montrent aussi clairement que l’aspiration unitaire est dominante en son sein. Les électeur-trice-s ont préféré choisir les listes qui indiquent le début d’un rassemblement, à la posture isolationniste du NPA qui a été désavoué. Cet échec exige du NPA qu’il se tourne vers une autre politique : il ne peut plus prétendre représenter à lui seul l’alternative dont les salarié-e-s et les classes populaires ont besoin, il ne peut plus se dérober aux exigences d’une unité avec d’autres forces à gauche du PS.
Le Front de gauche, constitué pour les élections des européennes, a proposé son élargissement pour les régionales. Mais ce dernier n’a été en fait que partiel (listes « Ensemble »), en raison souvent des blocages d’appareil. Dans quelques régions, cependant, c’est la totalité de la gauche de gauche, incluant le NPA, qui s’est unie et a fait campagne, donnant au « front » ainsi construit une dynamique militante nettement plus attractive. Tel est notre objectif. Au plan national, le Front de gauche marque la vie politique. Il se situe aujourd’hui comme un cadre incontournable de la recomposition à gauche du PS. Nous sommes favorables à son élargissement aussi bien sur le plan des forces politiques rassemblées que sur son enracinement dans le mouvement social.
Des convergences sont possibles
Les « unitaires » du NPA doivent défendre la perspective du rassemblement dans le débat du NPA et chercher à la rendre majoritaire dans le futur congrès. Mais elles et ils doivent aussi agir sans attendre dans le rassemblement en cours pour l’ouvrir et le transformer en un Front le plus large possible et le plus dynamique. Elles et ils peuvent jouer un rôle non négligeable, à leur échelle, pour qu’une composante significative de la gauche anticapitaliste soit présente et pèse dans cette perspective de rassemblement et sur ses contenus.
Depuis les régionales, plusieurs documents publics et plusieurs propositions convergent dans la même direction : la recherche du rassemblement, qui n’enlève pas la nécessité de persévérer dans le débat pour surmonter les obstacles ou les logiques routinières.
Nous (Convergences et alternative) avons participé à la déclaration « Faire Front pour ouvrir l’espoir à gauche » avec les Communistes unitaires, les Alternatifs, la Fédération pour une alternative sociale et écologique (Fase), pour affirmer ensemble que: « L’urgence est maintenant d’ouvrir les fenêtres d’un rassemblement à l’ensemble des forces politiques, syndicales, associatives et citoyennes de la gauche de transformation sociale. Leur implication est indispensable à la levée d’une dynamique et à une construction politique nouvelles. Cette union est attendue par toutes celles et ceux qui veulent résister et reprendre l’offensive contre le néolibéralisme ; qui veulent mener la bataille contre le Front National. Nous nous associerons à toute démarche allant dans ce sens. Il faut reprendre l’initiative tous ensemble, construire des convergences collectives à la base pour créer une dynamique de rassemblement. Nous sommes favorables à toutes initiatives, au niveau local, départemental, régional, s’appuyant sur les expériences unitaires en cours, aboutissant à des assises nationales d’un front ouvert à toute la gauche de transformation sociale, pour un travail d’élaboration et d’action politique en commun, dans les luttes sociales comme dans les prochaines échéances électorales. NOUS EN SERONS ! ».
De leur côté, conscientes de l’écart entre les potentialités du Front de gauche et sa réalité électorale, populaire et militante, les trois organisations du Front de gauche cherchent, chacune à sa façon, des pistes permettant sa relance sur des bases nouvelles.
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La Gauche unitaire indique ainsi qu’il faut « ouvrir encore » le Front de gauche, et « trouver les chemins d’une véritable dynamique militante et populaire, au-delà d’un fonctionnement cartellisé ». Elle propose la « tenue, sur le terrain, d’assemblées régulières de discussion, ouvertes à toutes celles et tous ceux qui seraient intéressés et qui partageraient ses objectifs politiques, même s’ils n’adhèrent à aucune des composantes nationales du rassemblement » ; ainsi qu’ « une plate-forme partagée et une offre politique pourrait sortir des Assises du Front de Gauche ....d’ici la fin de l’année 2010 » faisant « l’objet d’une préparation à l’échelon local comme départemental ».
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Le Parti de gauche formule lui aussi plusieurs propositions. Tout d’abord : « poursuivre partout où c’est possible l’union des forces qui se sont rassemblées dans les listes aux élections régionales », « c’est ce qui est en cours dans la forme la plus large en Languedoc R. et en Limousin. Là où ce n’est pas possible régionalement, il faut le faire dans les départements. Cela peut permettre de concrétiser un « front de gauche élargi ». Ensuite, « élargir le Front de Gauche à d’autres organisations », « inviter les partie prenantes de la campagne des régionales à y entrer. C’est un premier pas nécessaire, mais il n’est pas facile, ni assuré. Au niveau national, pour d’autres organisations et courants, notamment pour les partenaires des listes « Ensemble » (Alternatifs, FASE, MPEP, R&S, Alternative Citoyenne, groupes locaux ... sans parler du NPA) ».
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En ce qui concerne le PCF, les termes utilisés tournent autour des mêmes idées : élargir, transformer même le Front, au mouvement social, aux intellectuel-le-s, à d’autres forces politiques, même s’il est évident que le congrès du PCF en juin sera décisif. On sait le dilemme du PCF. S’il ne confirme pas l’orientation de type « Front de gauche », l’alternative est un retour vers une alliance avec le PS, que certain-e-s défendent dans le PCF. Mais s’il confirme le Front de gauche, il est entrainé dans une dynamique qui à chaque fois bouscule son appareil et ses choix identitaires « autour du parti » et aggrave ses tensions internes.
Néanmoins sur la base des positions des un-e-s et des autres, il y a amplement matière à discussions et des convergences sont possibles, pourvu que la volonté y soit.
Même si le cadre du Front de gauche est imparfait, que sa progression ne sera pas un long fleuve tranquille, que des batailles politiques devront y être menées, il faut répondre positivement aux propositions permettant un processus d’ouverture et de transformation aboutissant à des assises d’un front de gauche transformé réunissant toute la gauche antilibérale et anticapitaliste.
Des propositions concrètes pour avancer
Dans cette perspective le courant Convergences et alternative défendra les propositions suivantes.
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Dans le cadre de la construction de mobilisations unitaires le plus larges possibles (sur les retraites, les services publics,…), nous défendons la constitution d’un front politique de la gauche antilibérale et anticapitaliste qui puisse dégager des solutions alternatives et élaborer ainsi le contenu de possibles fronts communs à construire, à toutes les élections, pour défendre ses propositions.
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Nous prenons appui pour cela sur les expériences réussies de convergences qui se sont construites au cours des derniers mois (notamment à l’occasion des dernières élections régionales), et où militant-e-s du NPA, du PCF, des Alternatifs, de la Fase et au delà peuvent témoigner de la nécessité et de l’utilité d’un rassemblement politique sans exclusive de l’autre gauche. Ces expériences peuvent et doivent peser dans la reconstruction du front unitaires au niveau national.
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A toutes les étapes, à tous les niveaux (local, régional, national), nous nous battons pour que le NPA en tant que tel intègre le processus de convergence unitaire. C’est essentiel pour l’amener à choisir, sans attendre son congrès, mais aussi au moment son congrès. Quand le NPA s’y refuse, nous proposons à tou-te-s les « unitaires du NPA » de le faire. Et dans tous les cas, quand ce n’est que notre courant, Convergences et alternative, qui veut le faire, nous le faisons.
Les axes politiques de cette orientation sont à élaborer et à enrichir de nouvelles contributions, notamment à partir de ce que nous avons produit au fil des mois au sein du courant. Nous défendrons ainsi les idées essentielles qui nous ont rassemblées dans Convergences et alternative et qui fait l’utilité de notre contribution (cf. les textes de fondation du courant et les différentes déclarations et résolutions politiques adoptées par la suite lors de nos différentes réunions nationales).
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La construction, comme perspective de moyen/long-terme d’une nouvelle force, un parti issu de coalitions larges cherchant à contester l’hégémonie du PS à gauche ; qui ne soit pas faite « autour de » (ni du NPA, du PCF, du PG ou même de la Fase) mais « ensemble », au travers de la convergence de différents courants, un front agissant peu à peu comme parti politique dynamique, et non un « parti creuset » qu’aucune force présente ne représente seule.
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La nécessité pour la coalition de définir un programme qui réponde à l’urgence de la crise sociale, sur la base duquel nous défendons la perspective d’un gouvernement de la vraie gauche, sur une politique de rupture avec le social libéralisme et les politiques de gestion avec les remèdes libéraux tels que le pratiquent les socialistes au pouvoir notamment dans le sud de l’Europe.
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L’importance de formuler des propositions politiques alternatives, en s’appuyant sur les nombreuses réflexions qui existent, dans et en dehors des partis. Pour notre part, nous souhaitons continuer le travail commencé en notre sein, dès nos débats de fondation (cf. bulletin de débat), puis par la suite lors des régionales, sur le rapport entre institutions, construction politique et mobilisations sociales, sur la manière de poser la question gouvernementale, la place du mouvement social dans l’élaboration programmatique et les processus d’expérimentations et de transformation sociale, la liaison avec les processus internationaux indispensable…
C’est dans ce sens et sur ces bases que nous agissons avec tou-te-s les « unitaires » du NPA afin que toutes nos instances, des comités au CPN, répondent favorablement à toutes les propositions de débat et d’action unitaire : celle du PG, acceptée par les Communistes unitaires et la Fase de co-organiser avant l’été un débat sur les questions de conception de la politique ; celle des Communistes unitaires qui lancent un nouveau départ, vont investir provisoirement la Fase et prendre des initiatives de discussions stratégiques et programmatiques. Pour notre part, en tant que Convergences et alternative, nous participerons à ces rencontres et débats et agirons en conséquence.
Relancer la dynamique du NPA en menant la bataille au sein et en dehors du parti
Après à peine plus d’un an d’existence, notre parti, le NPA connait une crise profonde. Son utilité politique est certes, de fait, remise en cause par ses résultats électoraux mais également du point de vue de questions stratégiques fondamentales posées par la période : sur les formes d’organisation, de recomposition, d’intervention dans le champ politique et social. Le NPA s’est fondé sur une dynamique s’appuyant sur une aspiration unitaire qui lui a donné son élan initial. Mais il y avait aussi une contradiction fondamentale entre le discours d’un NPA soi-disant construit « par en bas » et sa réalité d’une initiative prise autour de la seule LCR, additionnée de quelques groupuscules. Ce sont ces contradictions qui sont en train d’éclater. Après une phase d’euphorie, nombreux-ses sont celles et ceux qui réalisent aujourd’hui que le NPA, tel qu’il s’est construit, n’est pas ce qu’elles et ils souhaitaient qu’il soit. Dans le même temps, des dirigeant-e-s du NPA en appellent à un retour aux « fondamentaux » et tentent de faire comme s’il était possible de revenir à un « projet initial » soi-disant consensuel. Mais l’histoire ne se répète jamais, surtout quand elle a déjà tranché. L’idée de construire un parti alliant le meilleur des traditions du mouvement ouvrier uniquement « par le bas », sans rencontrer d’autres cultures structurantes était, dès le départ, une fausse bonne idée, à qui la réalité de la lutte des classes s’est chargée de faire durement la peau.
Si nous voulons, non pas « revenir » à un projet fondateur confus et contradictoire, mais relancer, sur de bonnes bases, la dynamique militante qui a effectivement existé pendant plusieurs mois au cours du processus de constitution du NPA, il nous faut aujourd’hui clarifier une série de points importants. Le NPA est-il par lui-même la représentation politique qui traduise à lui seul l’alternative qui manque à gauche ? Se contente-t-il de regrouper les forces issues de l’extrême-gauche, ou cherche-t-il à se rassembler avec des courants issus de traditions différentes ? Cherche-t-il à construire un parti de masse, large, pluraliste, anticapitaliste ? Ou un parti d’ « avant-garde » révolutionnaire ? Ces questionnements, restés trop longtemps sans réponses, et les incompréhensions et quiproquos qui en ont résulté sont à la source de la crise que connaît le NPA et qui interroge bien des militant-e-s qui l’on rejoint. Le prochain congrès doit trancher et dire si le NPA reprend une démarche de débat avec d’autres forces ou courants, ou s’il se contente d’un objectif d’auto-grossissement autour du noyau initial.
La construction d’une alternative politique, changeant le rapport de force à gauche face à la domination du social-libéralisme, passe par un front des forces, qui constituent des coalitions dans les mobilisations sociales et les élections, puis posent la question de la force politique à créer. Cette question s’adresse à toutes les forces qui vont du NPA au PCF, jusqu’aux secteurs de la gauche des Verts et ceux du PS qui refusent sa transformation en parti démocrate cherchant des alliances vers la droite. Elle rencontre des résistances dans la direction du PCF, qui oscille entre une perspective de type Die Linke (en Allemagne) et une construction autour de lui-même refusant d’envisager son propre dépassement. Mais elle traverse en fait les forces de la gauche « radicale » au sein de laquelle s’inscrit le NPA qui reste une composante incontournable si l’on envisage un rassemblement d’une gauche de gauche en France.
On ne peut plus considérer qu’à côté du NPA il n’y a que « le PS et ses alliés ». Il y a bien des forces qui étaient associées aux coalitions « Ensemble » et qui partagent avec nous cette volonté de construction d’une nouvelle force politique alternative. On ne manque pas de « partenaires » avec qui engager la discussion. Et si des avancées réelles en termes de construction véritablement unitaires ne sont pas faites, l’éparpillement menace de l’emporter. S’il veut refonder une perspective de rassemblement d’une force nouvelle, le NPA ne peut éviter d’entrer en discussion avec d’autres partenaires, en apprenant aussi des expériences positives qui se déroulent en Europe à la gauche de la gauche. Aucune ne s’est faite autour d’un seul courant.
Tel est l’enjeu de taille qui se pose pour l’ensemble de la gauche de transformation sociale. C’est donc autour de cela que doit se faire le congrès NPA et que tou-te-s les « unitaires » de la gauche antilibérale et anticapitalistes doivent agir dès maintenant.