Publié le Mercredi 13 septembre 2023 à 17h00.

Croissance ou climat : il faut choisir

António Guterrez déclare fin juillet « L’ère du réchauffement climatique est terminée, place à l’ère de l’ébullition mondiale ». Mais du côté des gouvernants, ce sont toujours les mêmes rengaines sur la « croissance verte ».

 

À commencer par Macron pour qui renoncer à la croissance au nom de l’écologie ne serait « pas raisonnable ». Pourtant, de plus en plus de travaux scientifiques montrent l’incompatibilité entre croissance et sauvetage du climat.

L’illusion de la croissance verte

Une étude publiée le 4 septembre1 se penche sur l’argument du découplage entre le PIB et les émissions de CO2 dans les pays à haut revenu. Sur les 36 pays étudiés, 11 ont atteint un découplage absolu c’est-à-dire que sur la période considérée de 2013 à 2019, alors que le PIB continue d’augmenter, les émissions de CO2 baissent. Mais « les résultats obtenus en matière de découplage dans les pays à revenu élevé sont très loin de permettre des réductions d’émissions conformes aux normes de Paris ». En effet, en moyenne, leurs émissions n’ont été réduites que de 1,6 % par an, loin des – 30 % en 2025 et – 38 % par an en 2030 nécessaires pour atteindre l’objectif des 1,5 °C. Et l’étude de conclure : « La croissance verte n’est donc pas au rendez-vous et semble hors de portée des pays à revenu élevé. Nos conclusions suggèrent que la poursuite de la croissance économique dans les pays à revenu élevé est en contradiction avec les engagements de l’Accord de Paris en matière de climat et d’équité. L’atténuation conforme à l’Accord de Paris dans les pays à revenu élevé nécessitera des stratégies de réduction de la demande post-croissance en plus des efforts de décarbonation ­technologique. »

Pour une décroissance juste et écosocialiste

Une autre étude2 cherche à savoir « quelles dynamiques macroéconomiques seraient engendrées par une transition énergétique mondiale rapide, compatible avec l’accord de Paris ? » en modélisant « une économie mondiale qui, tout en continuant à croître, réaliserait une transition énergétique à marche forcée jusqu’à 2050 ». Selon ce modèle nommé Temple, le passage d’ici à 2050 à un système énergétique 100 % renouvelable demande des investissements à un niveau « inédit dans les économies occidentales depuis la Seconde Guerre mondiale », « les mécanismes classiques d’ajustement des prix et des quantités fondés sur le marché ne suffisent pas à imposer les investissements requis » et « la demande en investissements dans le secteur énergétique est telle que l’appareil productif ne peut pas répondre à la fois à cette nouvelle demande et à la demande en biens de consommation des ménages ». En conclusion : « les résultats des simulations (…) montrent surtout que la croissance économique constitue un handicap plutôt qu’un atout pour réaliser la transition énergétique. Nous appelons donc à l’étude et à la conception de scénarios de transition dans le cadre d’une économie post-croissance ».

Ce que le modèle n’évoque pas, mais qui est précisé par notre camarade Daniel Tanuro, c’est que la consommation supplémentaire d’énergie fossile nécessaire à cette restructuration de l’appareil productif provoquerait un surcroît d’émissions de CO2 (550Gt) équivalent, voire supérieur, au budget carbone (500Gt) compatible avec l’objectif des 1,5 °C.

Bien loin de la fable d’une transition énergétique pilotée par le marché et associée à une promesse de croissance, nous sommes de plus en plus clairement confrontéEs à l’impératif incontournable de la sortie des énergies fossiles et du nucléaire, associée à une réduction drastique de la consommation d’énergie et donc de la production matérielle et des transports. Un impératif aussi urgent qu’incompatible avec la logique d’accumulation du système capitaliste et qui appelle une décroissance juste et éco­socialiste.