Publié le Vendredi 11 juillet 2025 à 15h00.

La canicule aggrave les inégalités

Les températures explosent, et la France se rappelle soudain que le chaos climatique n’est pas une réalité lointaine, dont on peut continuer à détourner le regard. Les épisodes caniculaires, plus intenses et plus fréquents, ne sont pas les seuls effets du chaos climatique. Inondations, incendies, sécheresses... frappent et tuent toujours plus.

Pourtant, le changement climatique reste brandi comme une menace abstraite, une fatalité presque « divine », face à laquelle on « sensibilise » à tour de bras les populations « mal éduquées », tout en prenant soin de ne remettre en question ni les énergies fossiles ni, bien sûr, le système capitaliste et colonial qui en est à l’origine.

Quel meilleur exemple de cette dissociation que la lutte ce week-end contre l’A69 : présentée aux infos comme un trouble à l’ordre public (et économique), tandis que les opposantEs luttent précisément contre cet écocide qui participe à nous étouffer littéralement.

Injustice climatique, inégalités renforcées

Pourtant, nous ne sommes pas toustes étoufféEs de la même façon. L’écologie pirate de Fatima Ouassak rappelait déjà que s’adapter au changement climatique (et donc se protéger de ses impacts) n’est pas — et ne sera pas — accessible à toustes, en fonction de son genre, de sa classe, de son lieu de résidence ou de son assignation raciale. Et qu’à l’instar de la gestion de la crise du Covid, la gestion de la crise climatique par les gouvernements est classiste, validiste et raciste.

Les températures vont mettre à rude épreuve nos systèmes énergétique, scolaire, sanitaire, et vont encore accentuer les inégalités. Logements exigus et mal isolés, métiers pénibles, éviction des lieux publics et culturels, précarité constituent alors une double peine. Les travailleurEs essentielLEs se retrouvent encore une fois contraintEs de poursuivre leur activité sous 40 °C, où toute mesure de protection ne doit surtout pas freiner leur production au service des autres.

Mesures gouvernementales : poudre aux yeux

Au lieu de fermer les écoles par forte chaleur, il faut mettre en place un plan d’urgence massif d’investissement pour isoler les bâtiments et végétaliser les cours de récréation. L’urgence exige aussi d’en finir avec les « bouilloires thermiques », ces logements sociaux et habitats précaires construits avec des matériaux peu performants en termes d’isolation thermique, qui deviennent des fournaises en été.

Le décret « chaleur », applicable dès le 1er juillet, tombe à pic pour se donner bonne conscience. Mais on est bien loin de la prise en compte des effets du changement climatique sur le travail et la société.

Le texte se contente de réaffirmer les principes qui existent déjà dans le droit du travail : la prévention des risques professionnels, qui impose à l’employeur d’évaluer les risques auxquels ses salariéEs sont exposéEs, de prendre les mesures nécessaires pour protéger leur sécurité et leur santé, et d’adapter le travail aux travailleurEs. Il est bien avare en réglementation : mise à ­disposition d’eau fraîche et température « adaptée », merci ! Mais aucun seuil de température ou niveau d’alerte canicule n’est défini, au-delà desquels les pauses payées seraient obligatoires ou le travail simplement interdit.

Justice climatique, bataille syndicale

Ainsi, les représentantEs syndicalEs portent la responsabilité d’aller conquérir le minimum vital, dans l’urgence, avec des armes dérisoires et inéquitables. Notons que, là encore, les secteurs d’activité les plus fragiles, féminisés, diffus — TPE, travailleurEs des plateformes — partent désavantagés.

Même si les victoires sont à saluer, comme le plan obtenu par la CGT de la Bibliothèque nationale de France, avec, entre autres, une heure en moins sans perte de salaire au-dessus de 32 °C, et la journée entière au-dessus de 35 °C.

La justice climatique est un enjeu de lutte des classes, d’antiracisme et de féminisme, qui doit désormais être au cœur de la bataille syndicale et politique. Il s’agit de lutter pour toustes, pour aujourd’hui et pour demain à la fois. C’est une lutte pour la survie, pour la dignité et pour l’égalité, qui se joue dans toute la société.

Commission nationale écologie