Les magistrats et les avocats sont mobilisés depuis le début du mouvement. Mais leur lutte prend une nouvelle dimension avec le refus de la répression et de l’organisation de l’élection présidentielle de juillet. Témoignage d’un avocat.
Toutes les élections sont encadrées par les magistratEs : depuis la convocation du corps électoral, la révision des listes électorales, prévue à partir du 16 avril, puis pendant le déroulement du scrutin. Ils signent les PV des commissions communales, des bureaux de vote. Ils valident le vote. Si les magistratEs n’encadrent pas, les élections ne pourront pas avoir lieu.
À partir du mouvement du 22 février, un collectif de magistratEs a pris position. Ce n’est pas le syndicat officiel, un collectif est né, dans certaines cours et certains tribunaux. Ils ne reconnaissent pas l’ancien syndicat. Ils et elles sont de plus en plus nombreuses et nombreux et appellent les autres magistratEs à ne pas encadrer les élections.
Il y a eu un rassemblement auprès du ministère de la Justice. C’est une première dans l’histoire de l’Algérie que les magistratEs sortent comme ça, prennent position, fassent de la politique, réclament un syndicat autonome et l’indépendance de la justice. Pour la première fois, ils soutiennent le mouvement populaire, organisent des conférences de presse. Samedi 13 avril, ils ont organisé un rassemblement avec les avocatEs au ministère de la Justice.
Un positionnement contre la répression
Les avocatEs ont fait une fait une déclaration pour demander une solution politique à la crise actuelle. Ils et elles ne veulent pas être amenés sur le terrain juridique. La volonté populaire doit être plus forte que la loi et même que la Constitution. Si le peuple s’est soulevé, a réclamé des choses, il faut écouter sa voix.
Les avocats s’engagent dans une grève générale de quatre jours à partir du mercredi 17 avril. L’Union nationale des avocats appelle au mouvement. Dans les 48 wilayas, les tribunaux seront paralysés à partir de mercredi.
Les avocatEs ont fait un communiqué contre la répression. La Ligue des droits de l’homme aussi. On est du côté du peuple car on prononce des jugements au nom du peuple, on est nous-mêmes des enfants du peuple.
Des communes refusent aussi l’élection présidentielle
Des communes se sont également prononcées, la semaine dernière, contre l’élection présidentielle. Il y a un service des élections dans chaque commune. Lorsqu’on atteint l’âge de voter, on s’inscrit sur les listes électorales. Après la convocation du corps électoral, il y a une ouverture des listes au niveau des communes, des APC. À Tizi-Ouzou, Bejaïa, et dans d’autres wilayas, les maires ont déclaré qu’ils allaient boycotter, refuser d’encadrer. Ils ont fait un courrier officiel pour dire qu’ils refusaient de réviser les listes.
C’est du jamais vu. C’est de la désobéissance civile. Ils ont déclaré que, puisque le peuple refuse l’élection et qu’ils sont des élus du peuple, ils rejoignent le peuple.
Ils ont fermé le service des élections et ils ont affecté l’effectif pour renforcer l’état civil !
Si les APC boycottent, refusent l’ouverture des listes, de les vérifier, d’inscrire les nouveaux et de les envoyer au wali [haut fonctionnaire de l’État algérien]… Techniquement, il ne peut pas y avoir d’élection.