Publié le Dimanche 4 septembre 2022 à 20h00.

L’internationalisme toujours au cœur de notre Université d’été

Dans le chaos mondial que nous vivons, plus que jamais le programme de l’université d’été du NPA incarnait les deux dimensions de notre préoccupation internationaliste : celle d’analyser les dynamiques et les contradictions des puissances mondiales (et de tous les pouvoirs oppresseurs) qui mettent le monde en coupe réglée ; et notre préoccupation de la solidarité concrète avec les peuples et les classes populaires qui ne cessent de lutter.

 

La guerre en Ukraine a ainsi été présente dans cinq ateliers. Deux ateliers avec Gilbert Achcar, auteur de nombreux livres sur les impérialismes et la lutte des peuples pour leur droit à l’auto­détermination nationale, ont permis de discuter d’abord le contexte général d’affrontements croissants entre grandes puissances pour la domination du monde (« États-Unis, Chine, Russie, une nouvelle guerre froide ? »), puis la mortifère dynamique de militarisation du monde, d’autant plus scandaleuse avec la crise climatique qui ne cesse de croître.

Anti-impérialistes, au côté du peuple ukrainien

Face à cette militarisation, était affirmée, dans un autre atelier, l’urgence d’opposer un nouveau mouvement pour le désarmement, qui soit compatible avec le droit des peuples opprimés de résister aux offensives néocoloniales comme celle de Poutine en Ukraine. Une dimension féministe qui apparaît absolument nécessaire était donnée à l’introduction de cet atelier par Elisa Moros concernant la place des femmes, en tant que victimes mais aussi actrices dans les dynamiques de militarisation et de guerre qui martèlent la division sexuelle et la reproduction sociale, et qui est structurante pour les résistances émancipatrices.

Trois ateliers traitaient directement de l’invasion de l’Ukraine, revenant sur les prémices de l’invasion des troupes de Poutine le 24 février dernier, depuis l’indépendance ukrainienne en 1991, et traitaient en détail des débats et positionnements à gauche face à ce conflit, pour déboucher sur l’engagement dans des tâches de solidarité. Avec Daria Saburova notre invitée ukrainienne, avec Catherine Samary notre camarade du NPA engagée de très longue date avec les peuples de l’Europe du Centre et de l’Est, avec Dimitri et Maria nos invitéEs du mouvement antiguerre russe, nous voulions insister sur la dimension prioritaire de guerre de libération nationale menée par l’ensemble du peuple ukrainien contre une offensive purement coloniale, au-delà des manœuvres de grandes puissances dont chacune cherche à déployer ses intérêts. Pour nous, cela va avec un dialogue constant et une lutte aux côtés des gauches syndicales et politiques, des gauches anticapitalistes ukrainiennes mais aussi russes et biélorusses, qu’exprimaient également les contributions d’Elisa Moros sur la solidarité féministe et de Romain du secteur international de la CGT sur l’intervention des syndicalistes. Cette solidarité « par en bas » n’hésite pas à dénoncer le « deux poids deux mesures » des gouvernements occidentaux, par exemple sur l’accueil nécessaire des populations déplacées, ou les mesures contre les travailleurEs prises par le Parlement et le gouvernement ukrainiens, en même temps que s’opposer à l’aveuglement de secteurs de la gauche mondiale qui ne veulent pas se placer aux côtés de la résistance ukrainienne armée et non-armée.

De l’Ukraine à la Palestine en passant par l’Amérique latine

Un atelier introduit par des membres de la direction du NPA tentait de cerner les nuances et divergences qui s’expriment entre anticapitalistes sur ces questions. Enfin, nous avons voulu exprimer l’importance que nous accordons à ce conflit meurtrier dans le meeting central de l’université d’été le dimanche soir, en donnant la parole à Dimitri et Maria qui expliquaient en quoi les gauches russes anti-Poutine considèrent la lutte anticoloniale de la résistance ukrainienne, jusqu’à la victoire, comme leur combat. Et nous avons aussi marqué la date du 24 août, six mois après le début de cette guerre, également anniversaire de l’indépendance ukrainienne, en nous rassemblant nombreux à 13 h 45 sur la place centrale du village de notre université d’été, pour manifester notre propre soutien à la résistance ukrainienne, exiger la libération de Maksym Butkevytch, prisonnier emblématique des troupes russes, ainsi que celle de ses camarades, et transmettre ce message par les réseaux sociaux à nos camarades ukrainienEs et celles et ceux du Réseau européen de solidarité avec l’Ukraine.

Autre jalon de la préoccupation anticolonialiste de nos universités d’été, un atelier intitulé « Il y a 60 ans, l’indépendance de l’Algérie » a permis à nos camarades algériens Abder Raphi et Kamel Aissat de traiter les enjeux qu’ont alors et par la suite rencontrés les marxistes, anti-impérialistes et anticapitalistes de ce pays. Toujours dans l’objectif d’avancer dans nos analyses et nos responsabilités internationalistes, l’atelier réalisé sur « Israël : un État d’apartheid en voie de normalisation » avec Monira Mouhoun animatrice de la campagne BDS et Julien Salingue du NPA enrichissait la réflexion sur les caractéristiques du colonialisme israélien actuel, sur les complicités qu’il parvient à développer avec les autres États, et sur l’importance de la campagne Boycott-Désinvestissement-Sanctions impulsée par les PalestinienEs et qui s’est structurée sur la durée pour les soutenir.

Enfin, l’atelier « Chili, Équateur, Colombie… L’Amérique latine entre retour des "gouvernements progressistes" et nouvelles luttes de classes » a étendu nos réflexions à la situation toujours bouillonnante de ce continent. La discussion s’est élargi bien au-delà des trois pays au centre des introductions, et posait des questions brulantes sur les articulations et les contradictions entre processus sociaux populaires et questions institutionnelles comme celle du référendum sur la Constitution qui aura lieu le 4 septembre au Chili. Nous aurions bien voulu étendre encore le champ de nos discussions à d’autres situations qui nous interpellent, au Soudan, ou dans les pays marqués par la « Françafrique », entre la Turquie et le Kurdistan, en Birmanie ou d’autres pays d’Asie… mais les jours nous étaient comptés et comme chaque année nous repartons de Port-Leucate enrichis de connaissances, de contacts et de volontés d’interventions renouvelés, mais impatients de trouver le temps de compléter le champ de notre internationalisme !