Publié le Lundi 24 octobre 2016 à 08h56.

« Bien placé, un cancer peut rapporter jusqu’à 120 000 euros » L’explosion du prix des nouveaux médicaments !

« Un milliard d’euros de bénéfices, l’hépatite C on en vit très bien », « Bien placé, un cancer peut rapporter jusqu’à 120 000 euros », « Une leucémie, c’est en moyenne 20 000 % de marge brute », ou encore « Le mélanome, c’est quoi exactement ? C’est quatre milliards de chiffre d’affaires »...

Les affiches chocs de la campagne de Médecins du monde ont été interdites de métro « devant les risques de réaction négative » de l’industrie pharmaceutique. Alors une pétition prend le relais pour dénoncer « les marges colossales et révoltantes sur les traitements des malades » et poser une question simple à la ministre : « Quand il s’agit de santé, est-ce au marché de faire la loi, ou est-ce à l’État ? »

Car en France, les prix des médicaments ne sont pas libres, ils sont le fruit d’une très opaque négociation entre le gouvernement et l’industrie pharmaceutique à travers un Comité économique des produits de santé (CEPS). Alors qu’une équipe de chercheurs de Liverpool a estimé que le coût de production du nouvel anti-viral actif contre l’hépatite C, le Sofosbuvir, ne s’élevait qu’à une centaine d’euros pour les trois mois de traitement nécessaires, le laboratoire Gilead a obtenu un prix de revente de 41 000 euros, soit 400 fois plus ! 200 000 malades en auraient besoin... mais seulement 30 000 sont sous traitement. 

Sans bénéfice thérapeutique... mais avec des bénéfices financiers !

Depuis plusieurs années, le prix des médicaments est en constante augmentation : le Keytruda contre le mélanome est vendu plus de 100 000 euros par patientE, le Glivec pour soigner la leucémie 40 000 euros par an et par patientE. En une quinzaine d’années, le prix moyen des traitements de cancéro­logie a bondi de 10 000 à plus de 120 000 euros par patientE et par an. Une explosion qui n’est pas justifiée par le coût de la recherche et développement... qui a diminué et qui souvent bénéficie des crédits de la recherche publique ! Une explosion qui n’est pas justifiée par une spectaculaire amélioration de l’efficacité des molécules... puisque selon Médecins du monde, depuis les 20 dernières années, 74 % des médicaments mis sur le marché n’apportent que peu de bénéfices thérapeutiques....

Médecins du monde demande aux autorités de refuser de s’aligner sur les exigences de prix des firmes pharmaceutiques, de rendre le système d’arbitrage des prix plus démocratique et transparent, en y associant de façon structurelle des représentants des patients et des professionnels. L’association demande aussi de ne plus accepter les extensions de durée des brevets que la rapidité du développement des nouvelles thérapeutiques ne justifie pas, et enfin d’autoriser, comme cela existe déjà pour les traitements du sida et des infections opportunistes, l’utilisation de licences obligatoires pour les pays en développement, qui leur permettent la production et l’utilisation de génériques avant même que les brevets ne tombent dans le domaine public. En effet, la licence d’office peut être utilisée lorsqu’un médicament est mis à la disposition du public « à des prix anormalement élevés, ou lorsque le brevet est exploité dans des conditions contraires à l’intérêt de la santé publique », comme le souligne l’article L613-16 du Code de la propriété intellectuelle.