Lundi 6 septembre, premier jour réel de classe pour les élèves, quelque 30 % des profs ont répondu au mot d’ordre de grève lancé par le Snes-FSU, syndicat majoritaire dans les collèges et lycées. Inédit cet appel à la grève le jour de la rentrée, moment d’intense médiatisation autour de l’école. L’enjeu était de démentir l’autosatisfaction ministérielle, de montrer que la situation n’est plus tenable, que cette rentrée ne pouvait pas se faire. On ne peut pas parler de démonstration de force pour un secteur souvent plus largement mobilisé – ce qu’a encore démontré le nombre de grévistes dans l’Éducation le 7 septembre (55 % dans le secondaire, 62 % dans le primaire) –, en revanche cela manifeste un ras-le-bol sans précédent. Dire que chaque rentrée est pire que la précédente fait un peu rengaine, mais le problème c’est que c’est vrai ! L’école est attaquée par tous les bouts : dans son fonctionnement via la réforme de l’État (RGPP) qui supprime des milliers d’emplois, précarise les personnels, les fait exercer dans des conditions impensables il y a encore quelques années. Elle est aussi attaquée dans ses missions, via des « réformes » présentées comme conçues pour la réussite des élèves mais qui en réalité accentuent le tri social dans la plus pure tradition libérale. Cela va de la suppression des Réseaux d’aide en primaire, à la réforme des lycées version Châtel, en passant par le socle commun et le livret de compétence au collège : autant de miroirs aux alouettes qui cachent un projet de société profondément inégalitaire. De surcroît, cette année a vu un nouveau motif d’inquiétude avec la « réforme » du recrutement et de la formation des enseignants : dans le second degré, les étudiants désormais recrutés à Bac+5 (master) au lieu de Bac+3 (licence), sont jetés à plein temps devant les élèves dès la rentrée sans aucune formation professionnelle… comme si enseigner n’était pas un métier qui s’apprend. Cet assassinat de la formation des maîtres, que les syndicats enseignants se sont montrés incapables d’empêcher il y a quelques mois malgré un mouvement de grève extraordinaire dans les facs à ce sujet, est emblématique de la crise de l’école. On va vers une mutation majeure du système éducatif, dont les élèves en bout de course feront les frais. Les profs et tous les personnels de l’Éducation sont maintenant dos au mur, mais ils n’ont pas déposé les armes. La grève du 6, pour limitée qu’elle fut, manifeste une combativité réelle d’une partie non négligeable des enseignants, car les mêmes se sont mis en grève le 7 avec la conviction que la défense de l’école n’est pas dissociable, bien au contraire, de la lutte interprofessionnelle pour l’emploi et les retraites, dossier sur lequel se joue aujourd’hui l’affrontement décisif avec le gouvernement. Marie Giai Checa
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