La réforme du lycée, entérinée par le Conseil supérieur de l’Éducation le 10 décembre, constitue une remise en cause importante du système que nous connaissons et une grave régression. En décembre, la réforme du lycée a été mise en lumière auprès de l’opinion publique par la réaction de nombre d’intellectuels et personnalités politiques, contestant la suppression de l’histoire–géo en terminale scientifique. La défense de son maintien est une cause que le NPA doit soutenir : il n’est pas normal qu’on l’évince pour une partie des lycéens, de plus à l’âge où ils vont voter. Mais la réforme s’attaque aussi à d’autres matières, notamment les sciences économiques et sociales, dont le Medef disait, il y a peu, qu’elles « ne donnaient pas une assez bonne image de l’entreprise » et qui voient leur horaire réduit ! Il en est de même pour le français en seconde, les maths, retirées de la première littéraire.
Le jeu des options (modules exploratoires), enfin, et les passerelles d’orientation1, propositions séduisantes à première vue, entraîneront une spécialisation et une hiérarchisation des établissements, ainsi que le renforcement du tri social. Quant à l’accompagnement éducatif, il s’avérera vite être un leurre. Derrière une prétendue diversification, il s’agit donc, en fait, d’un appauvrissement de l’offre de formation au nom des économies réalisées sur le dos de l’école publique, en particulier du fait des 16 000 suppressions de postes prévues à la rentrée prochaine. Cette régression débouche sur une aggravation des conditions de travail des personnels enseignants et une détérioration des possibilités d’étude des jeunes qui se traduira nécessairement par un accroissement des inégalités scolaires. Mais Luc Chatel, ministre de l’Éducation, prétend aussi remettre en cause le statut des enseignants et la manière dont ils exercent leur métier. La réforme prévoit un conseil pédagogique, désigné par le chef d’établissement, avec des pouvoirs étendus, qui peuvent attaquer la liberté pédagogique. Ce conseil est une arme de guerre contre la nécessaire indépendance de l’enseignant. Le rôle du proviseur va être accru sur la dotation horaire globale (DHG), notamment sur les dédoublements de classes.
Une partie des heures d’enseignement en demi-groupes sera attribuée par les proviseurs de chaque établissement. Certaines matières qui bénéficiaient jusque-là de ces dédoublements les verront supprimés, ce qui aura pour conséquence de mettre les profs en concurrence pour le maintien de leurs heures de cours. Pour ces diverses raisons, il convient d’imposer l’arrêt de la mise en œuvre de cette réforme, qui fait courir des risques graves au service public d’éducation. Après la grève du 24 novembre, la manifestation du 10 décembre, surtout lycéenne, la grève du 21 janvier se profile à l’horizon. Lors de cette journée pour la fonction publique, les revendications des personnels de l’Éducation nationale seront présentes de la maternelle à l’université. Mais une journée de grève, même massive ne suffira pas : il convient dès maintenant d’envisager la suite du mouvement, en liaison avec celui des lycéens, interrompu par les vacances, et qui peut reprendre.
L’an dernier, l’action des jeunes a mis fin à la réforme Darcos. Leurs intérêts coïncident avec ceux des enseignants : maintenir l’offre de formation contre la régression libérale.
Tous et toutes ensemble, soyons déterminés à agir pour bloquer la réforme Chatel par un mouvement de lutte prolongé pour gagner.
Robert Noirel, Anne Lafran1. Voir Tout est à nous ! n° 35 du 17 décembre 2009.