Passer du régime présidentiel à un régime parlementaire, c’est la dernière trouvaille de Faure Gnassingbé pour rester, comme son père le fut, président à vie.
Le pays s’est réveillé avec une nouvelle Constitution votée dans la nuit du 25 mars par 89 députés sur les 91 que compte l’Assemblée nationale togolaise.
Non seulement il n’y a eu aucun débat, alors qu’il s’agit d’un changement important pour le pays, mais cette nouvelle Constitution, qui attend la promulgation de la présidence de la République, n’est toujours pas publiée. Elle le sera, d’après les autorités, lors de son effectivité.
La Constitution change…
Ce que l’on sait, c’est que ce nouveau texte s’inspire d’un régime parlementaire puisque c’est le parti majoritaire à l’Assemblée qui nommera le président du Conseil des ministres. Cette fonction concentrera tous les pouvoirs, notamment celui de représenter le pays à l’étranger et de diriger l’armée. Elle ne sera pas soumise à une limitation des mandats contrairement à celle maintenue du président de la République dont la tâche principale sera d’inaugurer les chrysanthèmes.
Faure Gnassingbé n’a pas immédiatement promulgué cette nouvelle Constitution censée inaugurer la 5e République du Togo. Il demande une nouvelle lecture à l’Assemblée nationale afin d’intégrer des améliorations au texte venant des différents secteurs de la société.
… mais le pouvoir demeure
Une façon de répondre à la levée de boucliers, tant sur la forme que sur le fond qu’inspire cette réforme. Beaucoup, et pas seulement dans l’opposition, font remarquer qu’un changement aussi majeur ne peut se faire sans un débat approfondi à l’échelle de l’ensemble du pays. D’autant que le mandat des députéEs expirait à la fin du mois de décembre 2023. De plus, les conditions de leur élection étaient des plus douteuses, ce qui a motivé à l’époque le boycott de cette échéance électorale par l’opposition.
Le but de la manœuvre ne fait guère de doutes. Il s’agit pour Faure Gnassingbé de pérenniser son pouvoir. En 2005, il a succédé à son père Eyadema, resté à la tête du pays pendant 38 ans. Depuis, il a déjà modifié la Constitution afin de briguer un quatrième mandat de président de la République et désormais il pourra s’éterniser au pouvoir comme président du Conseil des ministres.
Les droits humains restent en berne
Bien évidemment les caciques du pouvoir tentent de justifier cette réforme. Elle ouvrirait la voie à plus de démocratie. Mais, dans le même temps la conférence de presse tenue par l’opposition sur ce sujet a été interdite. Quant à la presse elle est toujours sur la sellette. Dernièrement Apollinaire Mewenemesse, directeur de publication du journal La Dépêche, âgé de 71 ans, a été emprisonné. Les dizaines de prisonniers politiques croupissent toujours dans les geôles depuis des années sans jugement. Ce n’est d’ailleurs peut-être pas un hasard si cette nouvelle Constitution est amputée d’un tiers de ses articles portant principalement sur les droits humains… relégués aux annexes.