A l’appel de la puissante fédération des ouvriers de la métallurgie (FIOM), plusieurs dizaines de milliers de manifestantEs (plus de 50 000 selon les organisateurs) ont défilé samedi 18 mai dans les rues de Rome. Deux mois après les élections législatives, et la mise en place du gouvernement de coalition dirigé par Enrico Letta (ex-communiste), cette initiative de la FIOM, oppositionnelle à la direction confédérale de la CGIL, est incontestablement un succès. Derrière la banderole de tête du cortège “Non possiamo più aspettare” (Nous ne pouvons plus attendre), toutes les régions étaient représentées, chacune avec ses délégations de salariéEs en lutte contre la politique d’austérité menée par le nouveau gouvernement.
“Nous sommes dans le rue parce que nous ne renonçons pas à notre idée de fond : nous voulons changer le pays et renvoyer chez eux ceux qui sont responsables de ce désastre”... L’objectif de la manifestation était on ne peut plus clair. Une ombre pourtant au tableau de cette belle mobilisation : les ouvriers de la métallurgie, malgré l’appel lancé par la FIOM aux salariéEs des autres professions, étaient bien seuls pour cette première riposte, seul le syndicat des retraités ayant répondu à l’appel.
Ou sont les partis ?
Mais c’est sans doute sur le plan politique que l’absence de mobilisation pour rejoindre le mouvement de contestation pose problème. Une maigre délégation de la SED (gauche écologiste), quelques militants du “Mouvement des 5 étoiles” du démagogue Beppe Grillo, un tout petit cortège du “Parti Communiste des Travailleurs” (trotskyste)… Mais où la gauche italienne était-elle passée ?
C’est Maurizio Landini, le secrétaire général de la FIOM, qui nous donne la réponse . “Je ne comprends pas comment on peut être au gouvernement avec Berlusconi et avoir peur d’être ici”. Faisant directement allusion à l’absence du PD (Parti démocratique ex-PCI), Landini exprimait à la tribune du meeting qui concluait la manifestation le désarroi et la colère de beaucoup de militantEs devant la honteuse participation de leur parti à la coalition gouvernementale qui regroupe le centre droit, le Parti de la Liberté de Berlusconi et le PD qui, il y a quelques semaines encore, dénonçait ce dernier et réfutait à l’avance toute compromission avec ce personnage infréquentable. De quoi en perdre son latin.
Impopulaire et peu crédible, ce gouvernement hétéroclite a donc peu de chance de se maintenir très longtemps. L’absence de perspective politique institutionnelle, la montée du populisme et l’aggravation de la crise imposent au mouvement social de hisser la mobilisation à un niveau supérieur.
De Rome, Alain Pojolat