Lors de son discours d'ouverture du débat parlementaire sur le mariage pour touTEs le mardi 29 janvier, Christiane Taubira a rappelé les réalités historiques du mariage : alliance et transmission du patrimoine, cadre de domination des femmes. Tout en sous-entendant à tort que ces réalités ne sont plus d'actualité, Taubira a annoncé la couleur : l'extension du mariage aura pour visée de faire entrer les homosexuelLEs dans le modèle normatif, considérant le couple binaire régi par un impératif de fidélité comme le seul possible, mettant au ban toute autre forme de couple. Cela montre que la société n'accepte l'homosexualité que si celle-ci « reste dans les rangs ».Confusion et discriminationLa droite entretient volontairement la confusion entre la procréation médicalement assistée (PMA, insémination artificielle) et la gestation pour autrui (GPA, recours aux mères porteuses). L'ouverture de la PMA aux lesbiennes (déjà autorisée pour les couples hétérosexuels) est un des axes principaux des tous les appels à manifester pour l'égalité des droits, contrairement à la GPA qui fait débat au sein du mouvement LGBT. Cependant, nous soutenons la circulaire Taubira qui demande aux tribunaux de ne plus refuser la nationalité française aux quelques dizaines d'enfants qui naissent chaque année d'une GPA à l'étranger, parce que dans le cas contraire ces enfants resteraient apatrides et / ou en situation irrégulière en France. Les réactionnaires critiquent la circulaire et crient au scandale : une preuve qu'ils ne se préoccupent des « intérêts de l'enfant » que quand ça les arrange !La droite continue aussi sur la vieille tradition consistant à cumuler les haines en prédisant une « invasion d'homosexuelLEs étrangerEs ». Largement fantasmée au vu de la politique migratoire menée par le PS, et du projet de loi qui n’ouvre le mariage aux couples binationaux que sous réserve qu’il n’y ait pas d’accord contradictoire avec le pays de la personne étrangère.Homophobie parlementaireLe Parlement a aussi à voter plusieurs milliers d’amendements au texte de loi, dont beaucoup sont similaires, amendements déposés par la droite et l'extrême droite qui tentent d'attaquer un droit déjà proposé au rabais, quand ils ne tournent pas aux pires amalgames homophobes (un amendement relançant l'atroce cliché de l'homosexuel pédophile en proposant d'ouvrir le mariage aux enfants)… Ceci vient concrétiser les propos homophobes de ces députéEs qui entretiennent et justifient la vague d’homophobie réactionnaire actuelle, avec comme conséquence une multiplication par trois du nombre d'appels désespérés reçus par SOS Homophobie depuis le début du débat sur le mariage.Pendant ce temps, l'organisation intégriste Civitas s'est rassemblée pour prier devant l'Assemblée « contre les forces du mal », déversant une fois de plus sa haine homophobe sans limites. Ces prières sont protégées par les forces de police dans l’indulgence générale des politiques, alors que les « prières de rue » des musulmanEs scandalisent. Force est de constater une fois de plus la place de la « laïcité » de notre pays.L'égalité reste à gagnerTout ceci montre que la bataille sur l'égalité des droits est loin d'être gagnée. Une simple « bataille institutionnelle » ne suffira pas, et les luttes continuent à être nécessaires pour pouvoir gagner sur ces questions. La PMA sur laquelle le gouvernement se contredit devient le symbole de sa politique de recul et un élément essentiel des mobilisations pour l'égalité. Au-delà du mariage pour tous, il y a de nombreuses autres batailles à mener, notamment sur la question du don du sang et d'organe par les homosexuelLEs, dont le refus a été confirmée par l'actuel ministère de la santé ; pour les droits des trans (changement d'identité facilité, dépathologisation…) actuellement seulement couverts par des promesses vagues et incomplètes ; contre l'homophobie, la transphobie, ainsi que le sexisme, dont l'omniprésence a été plus que confirmée par les récents débats, que des lois ne feront pas disparaître.Anastasia Damamme et Chloé Moindreau
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