Publié le Mercredi 5 mars 2025 à 12h00.

Négociations Zelensky-Trump, l’axe russo-américain se consolide

L’échange tendu entre les nouveaux maîtres de Washington et le président ukrainien a fait le tour du monde. Les commentaires médiatiques, a minima en France, se sont concentrés sur l’aspect moral de la conversation, « l’humiliation » subie par Zelensky, face à l’injonction qui lui est faite de remercier servilement les deux hommes et les États-Unis. 

 

Si la dignité et le courage dont a fait preuve Zelensky sont remarquables, les enjeux politiques de la conversation étaient tout autres. Les dernières sorties de Trump, épousant le discours du Kremlin sur la guerre, et le vote à l’ONU contre l’Ukraine, conjointement à la Russie, à Israël et au clan de pays dictatoriaux qui les soutiennent, avaient déjà acté le retournement d’alliance en cours. Alors, pourquoi cette mise en scène ? Parce que Trump avait besoin de légitimer l’arrêt des livraisons d’armes et du soutien militaire, ce qu’il vient de faire le 4 mars.

Besoin d’armes

Car Zelensky n’était pas venu chercher du respect, mais bien ce soutien militaire indispensable à la survie d’une Ukraine libre et indépendante : « C’est crucial. […] Sinon, Poutine ne s’arrêtera jamais. Et nous irons de plus en plus loin. Il ne s’agit pas de moi. Il déteste les Ukrainiens. Il pense que nous ne sommes pas une nation. »

Les objectifs et la nature profonde du régime néofasciste russe, le peuple ukrainien les a parfaitement compris. Il en paie le prix fort : des centaines de milliers de morts, des territoires et des villes complètement rasés, des millions de réfugiéEs, de dizaines de milliers d’enfants pris à leurs familles et déportés pour être « russifiés ». Et c’est bien cette vérité-là que beaucoup peinent à prononcer, des médias français jusqu’à cette gauche qui continue d’évacuer le sujet d’un revers de main, en expliquant doctement « qu’ils ont diabolisé Poutine »

La nouvelle donne impérialiste

La réaction européenne, au pied du mur, semble chancelante. Derrière les déclarations de soutien ferme, des orientations contradictoires se dessinent. La Pologne et l’Angleterre semblent s’accrocher désespérément au grand frère étatsunien ; la France ou l’Allemagne cherchent à s’adapter à la nouvelle donne à condition d’en sortir en position de force au sein de l’UE ; la Hongrie et l’Italie veulent jouer aux médiateurs d’extrême droite pour l’Europe avec leurs homologues russe et étatsunien. Les pays baltes, scandinaves et d’Europe de l’Est sont les seuls véritables soutiens sans faille de l’Ukraine, étant eux-mêmes exposés à plus ou moins court terme à l’impérialisme russe. 

Nous sommes à un point de bascule, avec le retour au premier plan de la question militaire et des forces fascisantes. Au lendemain de son entretien avec Zelensky, Trump commençait d’ailleurs à s’attaquer à Taïwan, en contribuant à l’isoler face à l’impérialisme chinois. 

Sursaut nécessaire de la gauche et du monde syndical

Dans ce contexte, le maintien d’une alternative progressiste et révolutionnaire implique de suivre quelques boussoles, que nous indiquent notamment les camarades ukrainienNEs : la défense de la paix ne peut se faire par le désarmement des agresséEs, qui est au contraire la voie la plus rapide vers une extension généralisée de la guerre ; la gauche se doit d’intervenir sur les enjeux liés aux armes — de la socialisation de la production au placement sous contrôle démocratique des décisions militaires. Dans l’immédiat, l’appel du RESU au sursaut de la gauche et du monde syndical et associatif est un point d’appui fondamental 1. Il est vital que la gauche et touTEs les progressistes écoutent les peuples qui subissent la violence des impérialismes néofascistes et de l’indifférence — voire du mépris — campiste.

Gin et Elias Vola