Les États-Unis ont déjà connu deux purges politiques de la gauche, la « Peur rouge » des années 1920 et le maccarthysme des années 1950, et nous sommes aujourd’hui en pleine purge Trump, qui est pire que les précédentes.
La « Peur rouge » des années 1920 a suivi la révolution russe d’octobre 1917. Elle a été immédiatement provoquée par des anarchistes autoproclamés qui ont envoyé des bombes au procureur général A. Mitchell Palmer et au juge de la Cour suprême Oliver Wendel Holmes. Le gouvernement américain a arrêté des milliers d’anarchistes, de socialistes et de communistes, dont plusieurs milliers d’immigrantEs originaires de Russie, d’Europe de l’Est et d’Europe du Sud qui ont été expulsés.
La guerre froide entre les États-Unis et l’Union soviétique, qui a débuté à la fin des années 1940, a conduit à ce qu’on a appelé le maccarthysme. Le sénateur du Wisconsin Joseph McCarthy, président de la sous-commission d’enquête permanente du Sénat, a tenu des audiences sur la subversion communiste et ceux qu’il a appelés à témoigner ont souvent vu leur vie détruite par cela seul, perdant leur emploi et leur réputation. D’autres commissions législatives du Congrès et des États ont également tenu des audiences. En 1954, le Congrès a adopté et le président Dwight D. Eisenhower a signé la loi sur le contrôle des communistes, interdisant le Parti communiste. Au cours de cette période, des centaines de personnes ont été emprisonnées et des milliers ont perdu leur emploi.
Criminalisation de ses opposants
Aujourd’hui, Trump et les Républicains s’en prennent à ceux que Trump qualifie de « gauchistes lunatiques, socialistes et communistes » ou de « membres d’un réseau mondial de soutien au Hamas » ou encore d’« antisémites ». Des immigrantEs sont déclaréEs « criminels » sans procédure régulière, arrêtés et expulsés.
Trump expulse de plus en plus d’immigrantEs, parfois en invoquant la loi controversée de 1798 sur les ennemis étrangers (Enemy Aliens Act), parfois en violant le droit des immigrantEs à une procédure régulière. Les États-Unis ont notamment expulsé illégalement Kilmar Abrego García vers son pays d’origine, le Salvador, et ont refusé son retour malgré une décision de justice. Trump a mis fin au statut de protection temporaire de centaines de milliers de migrantEs vénézuéliens, cubains, haïtiens et nicaraguayens, et la Cour suprême a confirmé sa décision. Trump a également modifié le statut de plus de 1 800 étudiantEs internationaux et jeunes diplôméEs, les rendant plus vulnérables à l’expulsion.
On retrouve ici des échos de la guerre froide, aujourd’hui remplacée par une guerre froide avec la Chine communiste. L’administration Trump a déclaré qu’elle révoquerait « de manière agressive » les visas des étudiantEs chinois qui étudient aux États-Unis, soit 280 000 personnes. Sont menacés ceux qui ont des liens avec le Parti communiste chinois, qui étudient dans des domaines critiques tels que les sciences, l’ingénierie et la médecine ou qui « causent des problèmes », c’est-à-dire qui participent à des manifestations.
Une répression globale pour tout manifestant
Ellen Schrecker, historienne spécialiste du maccarthysme, affirme que « l’attaque actuelle contre l’université est infiniment pire que le maccarthysme ». Cette attaque est plus large, plus puissante et vise à discipliner et à contrôler l’ensemble de l’enseignement supérieur. En 2021, le vice-président J.D. Vance a prononcé un discours intitulé « Les universités sont l’ennemi », et sous Trump, c’est certainement devenu le cas. Dans le but de discipliner les universités, Trump a gelé environ 11 milliards de dollars de fonds destinés à la recherche.
Le maccarthysme ne menaçait que des professeurs individuellement, mais selon l’historienne Ellen Schrecker, la répression de Trump sur « les manifestations sur les campus contre la guerre d’Israël à Gaza et les menaces d’expulsion d’étudiants et de membres du corps enseignant, […] cela touche également les salles de classe, les laboratoires, les programmes d’études, les bibliothèques, les dortoirs, les programmes DEI, les bureaux d’admission, les décisions en matière de personnel, les sports, les agences d’accréditation ». Trump a même recomposé des institutions entières telles que le New College of Florida.
Contrairement à la période McCarthy, nous assistons à une résistance croissante. À l’université Columbia, qui a cédé aux exigences de Trump, les étudiantEs ont hué la présidente par intérim, Claire Shipman. Et au MIT, la présidente de la promotion 2025, Megha Vemuri, a prononcé un discours percutant attaquant les liens du MIT avec l’armée israélienne et la guerre génocidaire contre le peuple palestinien. Elle en a payé le prix en étant exclue de la cérémonie de remise des diplômes. Mais la lutte continue.
Dan La Botz, traduction Henri Wilno