Publié le Lundi 4 mai 2015 à 19h31.

Vente du Rafale, budget de la Défonce

L’armée et les industries de guerre sont à la fête. A l’heure où le président de la République se déclare « fier » pour son pays de vendre l’avion de combat « Rafale » au Qatar, un régime despotique  et réactionnaire, les critiques sont étouffées. Ce lundi matin, 04 mai, le patron du PS – Jean-Christophe Cambadélis – tente de les écarter : il déclare sur les ondes de Radio France Info que « cela ne veut pas dire que nous cautionnons l’action extérieure du Qatar ». Il ne dit pas qu’un avion de combat, ça sert évidemment « l’action extérieure » d’un pays, d’un régime. A moins que Cambadélis ait voulu dire que les avions de combat ne doivent servir qu’à mater des révoltes intérieures, dans les monarchies du Golfe ?

Le propos de Cambadélis sous-entendait une distanciation vis-à-vis de l’aide que la monarchie qatarie procure aux mouvements intégristes et djihadistes. En même temps, c’est au nom de la lutte contre une menace djihadiste que sont justifiés des nouveaux crédits accrus alloués à l’armée française. Il ne s’agit pas ici de surveiller des cellules susceptibles de commettre des crimes comme ceux de la rédaction de « Charlie Hebdo » et d’HyperCacher : il s’agit bien du financement d’opérations extérieures, de type guerrier.

La France est actuellement engagée dans des guerres au Mali, en Centrafrique, en Irak et en Syrie. Elle est ainsi bien plus exposée que des pays comparables de l’UE, et peut être identifiée par certaines mouvances comme un « ennemi » prioritaire ; son rôle étant perçu comme illégitime par des pans entiers des populations auxquelles les islamistes veulent s’adresser, en raison du passé colonial et du présent néocolonial de la France en Afrique. Les peuples ont donc de bonnes raisons de se méfier de son intervention, qui pourrait ainsi procurer des arguments aux djihadistes (qui peuvent ainsi se donner un rôle de « résistants », alors qu’ils soumettent eux-mêmes les populations aux diktats résultant d’une idéologie réactionnaire). Alors que la France officielle reste une grande amie du Qatar, financeur d’un certain de boin nombre de ces mouvances…

L’année dernière, les opérations extérieures (OPEX) de l’armée française ont coûté 1,13 milliards d’euros. Mais seuls 450 millions avaient été programmés. Les autres 680 millions ont été prélevés sur des budgets qui avaient été réservés à d’autres ministères que celui de la « Défense ». Ainsi 83 millions d’euros ont été prélevés, en 2014, sur les crédits du ministère de l’Education nationale, et 63 millions sur celui de l’écologie, pour financer des opérations guerrières.

Et ce n’est pas fini. Le 29 avril 2015, le président François Hollande a annoncé un « effort » budgétaire supplémentaire de 3,8 milliards d’euros au profit de l’armée : 600 millions de plus pour l’année 2016, 700 millions en 2017, puis 1 milliard en 2018 et 1,5 milliard en 2019.

Evidemment, ce choix de privilégier les militaires et leur ministère ira au détriment d’autres besoins, sociaux ou écologiques, surtout en ces temps d’Austérité budgétaire, où il s’agit bien « de déshabiller Paul ou Pierrette pour habiller Jean-Yves ». Michel Sapin, ministre des Finances, est ainsi cité par la presse en ces termes, commentant l’annonce du 29 avril : « Ce qui ira en plus quelque part ira en moins ailleurs. » Le journal « Le Monde » ajoutant, le 02 mai, une citation attribuée « à Bercy » : « Le montant de 3,8 milliards (…) sera compensé dans les autres ministères ».

Au moins, les choses auront été clairement annoncés : faites la guerre, et pas l’amour ! Ni de l’éducatif, ni du social, ni de l’écologie, ni une meilleure santé…