Après la journée du 27 mai qui a été réussie, la bataille pour les retraites est à la croisée des chemins. Les collectifs unitaires qui se constituent dans beaucoup de villes sont la voie pour construire le puissant mouvement d’ensemble qui permettra de gagner. Les détails de la réforme des retraites ne seront annoncés que le 20 juin. Mais le gouvernement, à la veille de la journée de grève et de mobilisations du 27 mai, avait déjà proclamé la fin de l’âge légal de départ à 60 ans et son report à 62, 63 ans voire plus. Il confirme que la prétendue concertation n’est que du flan pour endormir l’ensemble du mouvement ouvrier et qu’il a fermement décidé de faire payer la facture de la crise à la majorité de la population. La réforme des retraites fait partie d’un vaste plan d’austérité qui consiste à nous faire travailler plus longtemps. Nous en savons suffisamment pour comprendre que l’épreuve de force est engagée. Ou plutôt qu’elle est engagée du côté du Medef, du gouvernement et de l’UMP. Malheureusement, en face, les salariés, les chômeurs, les retraités et les jeunes sont loin d’être en ordre de bataille. La journée de grève et de manifestation du 27 mai a été réussie. La grève a été bien suivie et les manifestations plus nombreuses que le 1er Mai. Mais des doutes sont apparus sur la possibilité de faire reculer le gouvernement et des questions sont posées sur les suites. Plus que des questions se posent sur la volonté des directions des grandes organisations syndicales d’organiser véritablement la résistance à la hauteur de la guerre sociale engagée non seulement en France mais à l’échelle de l’Europe contre les retraites, les salaires et les droits sociaux. Dans toutes les villes, départements, régions, se construisent des collectifs unitaires sur la base de l’appel, initié par la fondation Copernic et Attac, des chercheurs et des responsables politiques et syndicaux. Des centaines de militantes et militants d’origines diverses, syndicales, associatives ou politiques, se mettent à agir ensemble, à distribuer des tracts, coller des affiches, discuter, convaincre, organiser des débats, des meetings, à militer contre la destruction du droit à la retraite. Ce réseau s’étend et prend de l’ampleur. Patronat et gouvernement veulent nous imposer une société qu’on peut résumer en trois slogans : « travailler plus pour gagner moins », « malheur aux pauvres, aux plus âgés, aux plus usés », « jeunes, abandonnez tout espoir ». La construction d’une mobilisation générale qui prenne à contre-pied leur modèle de société est à l’ordre du jour. Il est clair qu’une seule journée de mobilisation ne suffira pas. Il faut trouver le chemin des convergences et des luttes. Comme nous l’avions fait contre le Contrat première embauche (CPE). Le travail de mobilisation à la base peut changer le rapport de forces, réchauffer le climat dans les entreprises, dans les quartiers, dans la jeunesse et convaincre qu’on peut se battre et gagner. Il faut aussi que cette résistance se voie, s’entende et se mesure dans la rue et sur les lieux de travail. Au lieu de sauter de journée en journée – une nouvelle journée de mobilisation est annoncée par les organisations syndicales le 24 juin – un puissant mouvement de grèves et de manifestations doit être construit pour faire reculer ce gouvernement. Une démonstration de force dans une énorme manifestation nationale serait aussi un pas dans ce sens. Aujourd’hui, il y a deux possibilités : soit Sarkozy passe en force et, comme l’a fait Margaret Thatcher en Grande-Bretagne, casse le mouvement social pour des années, soit il se prend un retour de boomerang grâce à une large mobilisation populaire. La partie reste ouverte. Sandra Demarcq
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