18 000. C’est le nombre de vols à vide que la compagnie allemande Lufthansa va faire décoller en janvier pour ne pas perdre les précieux créneaux aériens. Un créneau aéroportuaire est le droit que possède une compagnie aérienne pour décoller ou atterrir dans un aéroport à un certain moment de la journée. Une loi européenne, dite « Use it or lose it » (« Utilisez-le ou perdez-le »), demandait, avant la pandémie de coronavirus, que les compagnies aériennes effectuent au moins 80 % des vols prévus si elles ne voulaient pas se les voir retirer. Loi mise en pause pendant la crise, l’UE l’a rétablie en fin d’année en mettant la jauge à 50 % des vols, et ce quel que soit le niveau de réservation.
De nombreux et nombreuses éluEs insoumisEs et écologistes se sont insurgés face à l’absurdité de la situation, certainEs ont même saisi la Commission européenne pour exiger un changement législatif sur le sujet. Mais le problème se trouve-t-il réellement dans le fait que des avions volent à vide ? Si on est plutôt d’accord avec elles et eux pour dire que c’est un pas de plus en direction de la catastrophe écologique, on notera qu’un avion pollue sensiblement de la même façon qu’il soit vide ou plein. Quand en 2014 on comptabilisait plus de 37 millions de vols annuels, c’est le système qui le permet qu’il faut changer, et non les lois. Car la question centrale ici, c’est bien celle de la concurrence : on dit à des compagnies qu’il faut qu’elles utilisent leurs créneaux pour ne pas les perdre, mais surtout pour ne pas qu’une autre compagnie puisse les récupérer. Allié au développement massif des compagnies low cost ces dernières années et des publicités qui font leur promotion, le nombre de vols va continuer à augmenter chaque année.
Alors que l’aviation représente à elle seule 5 % du réchauffement climatique (gaz à effet de serre et condensation), ce ne sont que les plus riches qui y ont accès. Seulement 10 % de la population mondiale prend l’avion, et en France les 10 % les plus riches prennent l’avion six fois plus que les 10 % les plus pauvres. Encore une fois, on remarque que ce sont les plus aisés qui polluent, ce qui ne fait que confirmer que le niveau de revenu est le principal facteur qui joue sur l’empreinte carbone individuelle.
Il est donc urgent de repenser collectivement nos besoins en matière de mobilité, notre rapport au temps et de mettre la production au service de ceux-ci. On peut dans un premier temps exiger l’arrêt immédiat des vols intérieurs et militer activement pour des services publics de transports gratuits, qui répondent à nos besoins et non à des logiques de profits.