Ce n’était pas gagné, mais nous l’avons fait ! Rassembler des acteurs et actrices de terrain, paysanEs, chercheurEs, journalistes, militantEs associatifs, pour échanger, entre elleux, et avec le NPA et Philippe Poutou, sur la situation de l’agriculture en Bretagne, sans tabous, sans a priori, sans langue de bois...
Pendant deux heures, nos invitéEs, Yves-Marie Le Lay, militant associatif (le symptôme, les algues vertes), Inès Léraud et Morgan Large, journalistes (le système qui mène à ça), Jules Hermelin, paysan anthropologue (la fuite en avant du monde paysan), Jean-Claude Balbot, militant paysan (la sécurité sociale de l’alimentation) et Michel, paysan du NPA (une vision anticapitaliste d’une agriculture paysanne), ont exposé leurs points de vue, échangé, discuté, répondu aux questions de la salle, et construit ensemble un discours partagé à partir de leurs analyses propres.
Quand il a fallu arrêter, parmi la quarantaine de personnes présentes, tout le monde avait le sourire ! Les intervenantEs, convaincuEs d’avoir exprimé l’essentiel, le public, ravi d’avoir bénéficié des éclairages toujours pertinents, souvent brillants, de la tribune, les militantEs du NPA et Philippe Poutou, conscientEs d’avoir participé à un moment important de construction d’un savoir collectif... et d’avoir tant appris !
Un travail à continuer, une expérience à reproduire. Philippe l’a dit, le soir, au meeting de Brest, parlant de la table ronde : « Il y en a, de l’intelligence à partager, dans notre camp social » !
Ci-dessous l’intervention de Michel, camarade paysan du NPA.
Nous ne sommes pas des donneurs de leçons, nous n’avons pas toutes les solutions, mais il y a une chose dont on est sûrs, c’est qu’il faut rompre radicalement avec ce système capitaliste. Comment rester muet, comment ne pas être révolté devant tant d’injustice ?
Rompre avec le capitalisme !
Seule une petite minorité profite du modèle Macron, et l’agriculture n’échappe pas à la règle. Ce système productiviste fait le malheur de beaucoup. Si tu ne te bats pas contre ton voisin, tu es foutu ! Ce n’est que concurrence et chacun pour soi ! Le nombre de paysanEs s’effondre et les déserts ruraux s’agrandissent. Il y avait un slogan, dans les années 1970 : « Moins de terrain, plus de voisins ! » Cela semble d’un autre monde aujourd’hui, où sont passés les voisinEs ?
Le métier se ferme et se referme sur lui-même, la désespérance profite aux choix racistes et fascistes ! Le renouvellement des générations ne se fait plus. Les femmes quittent les fermes pour chercher un revenu extérieur. Le foncier va agrandir les fermes-usines. Enfin les aides, les fameuses aides, sont à l’hectare, pas à l’actif. Le capitalisme est installé et dicte sa loi. Seul un modèle anticapitaliste de rupture peut briser cela !
Une agriculture ouverte à toutes et tous
Ouvrons l’agriculture à touTEs, issus ou pas du milieu agricole et créons les outils d’émancipation paysanne. Ce ne sont pas les aides qui sauveront le monde agricole, c’est le monde agricole qui se prend en main ! Ces nouveaux outils d’émancipation concernent la production, la transformation et la commercialisation (ça, c’est innovant !) à l’image des fruitières, en montagne, qui ont su garder leur identité, leur savoir-faire et leur rémunération. Il faut aussi l’égalité hommes-femmes dans l’agriculture.
Un statut nourricier
La terre agricole doit être protégée de toute spéculation et devenir un héritage pour l’humanité. Le travail agricole est contrôlé pour préserver cet héritage, la mise à disposition du foncier se fait par un bail de carrière révocable sous contrôle citoyen.
De nouvelles façons de travailler, collectives (ou pas), sont à inventer. Faisons confiance à ces nouveaux acteurs, jeunes (ou pas). Un bail de carrière, pour court-circuiter le poids du foncier qui plombe la trésorerie de chaque génération à l’installation et engraisse le système bancaire.
Transformation
À Rostrenen, ils savent de quoi je parle, ils ont gardé leur abattoir ! Pour valoriser et garder la plus-value chez nous, ce sont des outils collectifs loués à la prestation, qui emploient des professionnelEs de l’agroalimentaire, des outils ou un savoir-faire, et la qualité des produits porteront la fierté des métiers de l’agroalimentaire, des conserveries de légumes et viande pour gérer les productions saisonnières.
La commercialisation
Cette étape-clé a été volée aux producteurs au profit de la grande distribution ! C’est dans la formation professionnelle et dans l’inventivité des acteurs, des structures nouvelles au plus près des consommateurs, que ce lien producteur consommateur doit se renforcer. La sécurité sociale de l’alimentation rend accessibles les produits et rémunère les producteurs1.
Pour une agriculture sur un modèle anticapitaliste, féministe, antiraciste et internationaliste !
Retrouvez la vidéo de la table ronde sur notre site
- 1. Voir notre dossier dans l’Anticapitaliste n° 602.