Lydie Salvayre, Seuil, 2014, 18,50 euros. Acheter sur le site de la librairie La Brèche.
Présent dans toutes les librairies, dans les rayons des grandes surfaces, ce livre est le Goncourt 2014. Alors pourquoi en parler dans l’Anticapitaliste ? Eh bien parce que sa lecture est succulente et qu’elle nous fait revivre quelques morceaux choisis de la révolution espagnole : libertaire, passionnée, enjouée et dramatique.
Ce n’est pas un essai politique. C’est une vie que l’auteure nous narre au travers des souvenirs (plus ou moins envolés) de sa mère, allant avec truculence jusqu’à rapporter le langage, le phrasé de cette mère catalane qui entrecoupe son récit (haché) de mots en espagnol et d’expressions « francisées »... et vice-versa. Au-delà des bribes du passé, c’est une plongée dans la vie d’un village en Aragon en 1936, en pleine révolution ; une escapade dans Barcelone la libertaire, où Montse (la maman) va, peut-être, rencontrer un improbable André Malraux...
Pas politique mais des passages développent les horreurs du franquisme et de la hiérarchie catholique contre le petit peuple en révolte, contre les républicains et les révolutionnaires, que Georges Bernanos – fervent croyant croisé dans cet ouvrage – va dénoncer avec véhémence. Oui, pas politique, mais avec des flèches bien décochées contre la politique des staliniens et leur chasse contre les poumistes et autres cénétistes…
Tout cela dans un style alerte, émouvant et très drôle, qui nous fait sentir, goûter même, ce moment du siècle dernier porté par tant d’espoir mais qui succomba devant tant de trahisons.
Gérard Mas