«La guerre des classes existe, c’est un fait, mais c’est la mienne, la classe des riches, qui mène cette guerre, et nous sommes en train de la remporter. » C’est en tombant sur cette citation de Warren Buffett, le golden-boy bien connu, que germe dans la tête de François Ruffin l’idée de ce livre. L’auteur assume d’emblée son projet : mettre la guerre des classes au centre du propos, « comme une vision du monde, une division entre riches qui s’enrichissent et pauvres dont seule la résignation s’accroît. » Il organise sa recherche en interrogeant le discours des organisations de la gauche traditionnelle, du PS et de ses alliés. Son verdict est sans appel : « prose d’impuissants. Qui déguise sa lâcheté sous les injonctions au " courage ". » Ce sera l’un des fils rouges de l’auteur, jusqu’à poser cette question : Royal, Valls, Delanoë, DSK « à quel camp appartiennent-ils, au fond – eux qui prétendent qu’il n’y a plus de camps » ? Ruffin confronte en continu ces deux réalités : le discours des dirigeants de gauche, qui tous ou presque se refusent à désigner l’ennemi, le capital, et la réalité vécue au quotidien par les salariés, livrés à eux-mêmes, subissant fermetures d’usine et restructurations en cascade. Dans ce cadre, il utilise un certain nombre d’enquêtes qu’il a réalisées pour le Monde diplomatique, sur Airbus, sur les ouvrières licenciées par Bernard Arnault, sur Valéo, sur la métallurgie dans le Vimeu… Cette structure rend la lecture très fluide et permet d’illustrer en permanence la réflexion, qui, si elle n’apporte aucun concept novateur, permet de démontrer le cadre idéologique qui lie le patronat, les riches et le personnel politique, comme l’affaire Woerth-Bettencourt est venu le rappeler. On ne peut qu’être d’accord avec Ruffin, lorsqu’il insiste encore et toujours sur ce fait : c’est l’opposition des intérêts de classe qui structure la société. Et dans cette guerre, il faut savoir choisir son camp ! Henri ClémentFayard, 254 pages,19 euros