Tout sourire, Macron nous l’a annoncé le 14 juillet : le Covid c’est fini, l’école peut recommencer comme avant. Et surtout comme si « quasi » rien ne s’était passé depuis septembre dernier.
Pour les personnels de l’éducation nationale, l’année qui vient de s’écouler a pourtant été tout sauf ordinaire. Elle a commencé par un mouvement de ras-le-bol contre la dégradation des conditions de travail, cristallisé autour du suicide de Christine Renon. Puis il y a eu la grève massive contre la réforme des retraites, suivie par celle contre les E3C, les épreuves anticipées du bac Blanquer. Et enfin, à partir du 16 mars, le grand n’importe quoi de la « continuité pédagogique », où chacunE a dû improviser en catastrophe, sans moyen, et s’adapter à des directives qui changeaient du jour au lendemain.
De tout cela, il faudrait tenir compte pour remettre à plat une gestion catastrophique de l’éducation nationale, qui plonge les élèves et les personnels dans le désarroi le plus total. Ce n’est pas pour rien que la médiatrice de l’éducation nationale annonce avoir reçu un nombre record de recours.
Mieux que la chloroquine, la pensée positive pour soigner la crise éducative
Mais visiblement Macron et son ministre n’en ont rien à faire. Ils pratiquent, disent-ils, la « pensée positive ». Autrement dit, il suffit de croire que tout est revenu à la normale pour que ça soit vrai. Cela explique sans doute la tonalité de la stupéfiante circulaire de rentrée publiée le 10 juillet. Presque rien sur la menace sanitaire, dont les scientifiques nous disent pourtant qu’elle plane toujours au-dessus de nos têtes. Tout juste obligera-t-on élèves et enseignantEs, à partir du collège, à porter un masque, probablement à la charge des familles…
Une semaine plus tard, un « plan de continuité pédagogique » est venu, en apparence, compléter la circulaire. En apparence seulement, car les scénarios qui sont étudiés, à savoir la nécessité de fermer partiellement ou totalement les établissements scolaires sur une zone géographique, ne s’accompagnent d’aucuns moyens supplémentaires par rapport à la situation que l’on a connue en mars dernier. En cas de reprise de l’épidémie, il y a donc fort à parier que ce sera, une fois encore, aux personnels de pallier les carences de l’institution.
Blanquer redouble à l’éducation, et ce n’est pas une bonne nouvelle
Manifestement déçu de ne pas avoir décroché le ministère de l’Intérieur, Blanquer se console en remettant sur le tapis ses vieilles obsessions. Alors même que la priorité devrait être que les élèves puissent renouer à leur rythme et en toute confiance avec l’école, ils et elles seront évalués, testés, positionnés dans des cases, dès les premiers jours de septembre. La logique du « tout pour les fondamentaux » se confirme aussi puisque, pour les élèves jugés en difficulté, cinq heures pourront être prises sur les autres matières pour faire des maths et du français. Une vision pédagogique datée, à l’opposé de l’ambition de fournir une culture générale à toutes et tous, en particulier à celles et ceux dont la sociologie nous apprend qu’ils en ont le plus besoin.
Quant aux nouvelles directives sur l’instruction civique, elles n’augurent rien de bon, surtout quand on connaît les positions extrémistes de Blanquer sur la laïcité. Loin d’ouvrir à la citoyenneté, il s’agit avant tout de faire « respecter les institutions et les lois ».
Enfin, Covid ou pas, le tournant autoritariste du ministère se confirme. C’est ce que vivent notamment nos trois collègues de Melle, suspendus au seul motif de s’être opposé au bac Blanquer, et dont la suspension vient d’être prolongée, au mépris du droit, par la rectrice de Poitiers.
Pour nous, l’enjeu principal de la rentrée, c’est précisément qu’elle ne soit pas « normale ». Sortons de la stupéfaction des derniers mois. Retrouvons notre combativité pour lutter contre Macron et Blanquer pour qui le monde d’après, c’est nous imposer la vieille école d’hier.