Éditions Agone, 2022, 256 pages, 17 euros.
Le titre annonce assez clairement le contenu du livre. Le sous-titre le précise encore davantage : Deux siècles de critique anticapitaliste des médias, de 1840 à nos jours. Dominique Pinsolle, historien à l’université de Bordeaux, raconte la vieille lutte contre les médias dominants naturellement au service de la classe dominante, celle des bourgeois.
Ce livre militant évoque avec détail le développement de la presse dans le courant du 19e siècle, une presse qui va vite devenir un moyen d’enrichissement pour des propriétaires entrepreneurs et se transformer dans le même temps en instrument de propagande et de contrôle des populations entre les mains des pouvoirs politiques et économiques. Tout cela se déroule et se renforce, avec des hauts et des bas, pendant les années de la révolution industrielle, en même temps que le capitalisme se perfectionne.
Quand le mouvement ouvrier contestait la mainmise des possédants sur la presse
Les réflexions et les tentatives du mouvement ouvrier et des partis de gauche pour contester la mainmise des possédants sont rappelées. Ces combats dénonçaient le monopole, l’absence de démocratie et de liberté d’expression mais visaient aussi à élaborer une presse populaire, contestataire, pour faire exister des outils de contre-pouvoir ou au moins de contre-propagande, pour faire vivre les idées de la lutte pour l’émancipation, pour la défense les intérêts des oppriméEs. En passant, mais ce n’est pas un détail, on retrouve la « gauche » au pouvoir, avec le PS et Mitterrand gaspillant la possibilité d’agir, trahissant, là encore, leurs promesses de loi contre la domination des capitalistes dans la presse.
Un combat ancien, toujours bien actuel
Ce problème de médias aux mains des plus riches est donc une très vieille histoire qu’il est important de connaître. Pour Dominique Pinsolle, pour nous aussi, il y a besoin aujourd’hui de relancer la critique anticapitaliste des médias. On le fera d’autant mieux et d’autant plus efficacement en apprenant des combats passés, en bonne partie contre la domination de classe, en ayant connaissance des travaux et des actions d’intellectuelEs, de journalistes, de militantEs syndicalistes et politiques du passé, de sociologues comme Pierre Bourdieu, ou des travaux critiques du Monde diplomatique ou encore d’Acrimed.
À l’époque où les milliardaires, parfois réactionnaires et d’extrême droite, qui s’approprient et monopolisent la plupart des médias importants, au moment où le cynisme et l’arrogance des classes bourgeoises repoussent sans cesse les limites, ce livre est très utile. Il rappelle que la critique de la presse dominante et la bataille pour la démocratie, pour la liberté d’expression font partie de nos luttes anticapitalistes.