Publié le Dimanche 16 décembre 2012 à 17h48.

Jack London, toujours actuel

Par Henri Clément

Avec régularité, les éditions Phébus poursuivent la réédition des œuvres de Jack London, et chaque nouveau volume permet de découvrir les multiples facettes de ce formidable écrivain. Ce nouveau recueil n’échappe pas à la règle et nous donne à lire quelques excellents textes, en particulier Le Mexicain. Dans cette nouvelle, London allie deux thèmes qui lui sont chers : la boxe et la révolution. Le héros principal, un jeune garçon dépenaillé, consacre toute son énergie à la cause de la révolution mexicaine. Tout l’art de l’écrivain est mis au service du combat social, les scènes sont ciselées, le scénario impeccable et la proximité du jeune héros et de London est patente, en particulier lorsque le narrateur expose la source de la vigueur et de l’énergie de jeune homme : « Car derrière lui, stimulant sa foi, existaient des forces beaucoup plus profondes que n’eût pu l’imaginer cette salle comble. »

Récit du combat et de l’espoir, cette nouvelle repose aussi sur un sentiment de haine et une volonté de vengeance particulièrement puissants. Un autre texte du recueil vient illustrer l’origine de tels sentiments. Intitulé Sous les auvents du pont, un jeune garçon y occupe également, même si c’est brièvement, une place prépondérante. Il n’est pas le héros, mais la victime d’un jeu particulièrement cruel par lequel s’exprime toute la morgue et le mépris des bourgeois. Ce texte est animé d’une violence qui reste sous-jacente mais qu’il est impossible d’ignorer.

Pour autant, la violence ne l’empêche pas de traiter de ce sujet sur un registre plus tragi-comique, comme en témoigne la nouvelle Tuer un homme. Un homme, contraint au chômage, cambriole une maison, mais se retrouve à la merci d’une jeune femme. S’engage alors une discussion sur les ressorts et les motivations du monte-en-l’air : « Quand les temps sont durs et que le travail manque, les gens désespèrent. Alors, ceux qui ont des richesses prennent peur et font casquer ces pauvres bougres. »

Voilà qui suffirait largement à démontrer l’actualité de London. Tous ces textes sont portés à la fois par une haine de l’exploitation et un amour de l’humanité, et de la nature. L’auteur ne supporte pas plus la souffrance animale que la souffrance humaine, et Le coup de folie de John Harned, réquisitoire contre la corrida, met en scène cette préoccupation. Tous les textes de ce recueil sont traversés de ce même amour de l’homme et de la vie, une lecture roborative en ces temps de crise. O

La Fille de la nuit, Jack London, coll. Libretto, Phébus, 2011, 9,60 euros.

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