Publié le Vendredi 13 mai 2022 à 20h00.

Maltriarcat : quand les femmes ont soif de bière et d’égalité, d’Anaïs Lecoq

Éditions Nouriturfu, collection « Le poing sur la table », 144 pages, 15 euros.

La couverture flamboyante de ce livre annonce la couleur : il s’agit de bière, de la plus belle espèce, amère et colorée... et de celles qui la font !

Les premiers brasseurs étaient des brasseuses !

L’autrice fait l’inventaire, aux origines, de la production de bière en tant qu’activité domestique. De la Mésopotamie à la Scandinavie, on boit – on mange – de la bière qui, comme on le sait, est un breuvage très nourrissant. Dans le cadre de la division genrée des tâches, le brassage revient donc aux femmes... Mais cela va plus loin et la bière sort de l’aire domestique, puisque dès l’Antiquité, des femmes tiennent des cabarets où la bière est vendue et consommée, leur donnant une certaine autonomie financière...

Comment en est-on arrivé là ?

Là ? Un monde de la bière associé à des mecs (blancs, hétéros) qui en ont ! L’autrice décrit le processus par le menu. Pour faire court, mentionnons le moment où la bière sort de la sphère familiale en devenant une production industrielle, à la qualité constante, consommée de plus en plus par « des classes sociales plus aisées et des élites ». En d’autres termes, brasser devient rentable et prestigieux : une affaire d’hommes donc !

Reprendre sa place !

Quand les femmes reviennent dans le jeu, c’est sur l’étiquette... le plus souvent pour le pire : conforter la bière comme une boisson pour mâles dominants. Pour reprendre leur place au brassage, à la dégustation, à la distribution, c’est toute une histoire, l’histoire du retour des femmes du bon côté de la chopine !

C’est cette aventure que relate l’autrice, en nous invitant à explorer le domaine de la bière artisanale, les brasseries craft. Celles-ci se multiplient, dans une recherche de qualité et d’identité de bières de caractère, et ouvrent un nouvel univers de la bière. Celui-ci, pour autant, n’est pas spontanément féministe, loin s’en faut, mais permet l’émergence de zones libérées au sein desquelles des femmes, brasseuses, sommelières, commerciales, patronnes de brasserie, s’imposent. Comme par hasard, il s’agit très souvent de démarches collectives, collaboratives, voire carrément politiques !

Comment mieux conclure que la quatrième de couverture : « L’autrice dessine un panorama saisissant et sans-faux-col de ce monde de la bière en pleine effervescence où le partiarcat a désormais la pression » ! Je prendrais bien une tit’ bière, moi...