Publié le Jeudi 18 mai 2023 à 17h00.

Re ar Menez, de Dounia Wolteche-Bovet

Documentaire, 2022, 52 min.

Davantage qu’un récit, Re ar Menez est une sorte d’évocation poétique de la lutte des habitantEs de Saint-Cadou, dans le Finistère, contre l’installation d’une antenne 4G/5G au sommet de la colline près du village.

Lutter dans les Monts d’Arrée...

Il s’agit d’une lutte à petite échelle, qui implique une toute petite communauté villageoise, dont nous sommes invitéEs à suivre le parcours de sensibilisation, de mobilisation, de confrontation à l’opérateur, lui-même soutenu par la gendarmerie. Tout part du refus, comme une évidence, de se voir imposer un projet dont on ne veut pas, dont on ne voit pas au nom de quel intérêt supérieur il pourrait s’imposer là.

La lutte qui s’organise repose sur quelques personnes, intimement liées à leur territoire, à leur environnement, à leur structure sociale. AgriculteurEs bio, éleveurEs de chèvres, habitantEs ancréEs, partie prenante d’un paysage difficile, autour duquel la pluie, le vent, la boue sont le lot commun, le cadre quotidien. 

Ces gens-là parlent breton. Les paysanEs âgés partagent la langue, leur langue maternelle, avec les enfants, leurs petits-enfants qui l’apprennent en immersion. Le breton est la langue de la vie à la ferme, de la traite à la commercialisation des produits en vente directe. C’est aussi la langue de la fête, du chant et de la danse au moment du fest deiz, point de rencontre au cœur de la lutte. 

Le cheval bleu

L’évocation du cheval bleu — la petite éclaircie fugace qui traverse l’épaisse couche de nuages sombres dont sont faits les ciels bretons, à laquelle on peut prêter cette forme — le recours au super 8, en noir et blanc, pour filmer la déambulation des enfants, en font un documentaire poétique. Puis, le point de vue des enfants sur la lutte, sur leurs jeux au cœur du bois menacé — qui fait penser à la ZAD des enfants installée dans le bois de Bord, contre le projet autoroutier A133/A134 — sur leur vision hésitante du monde — que peut-on penser à 10 ans de l’usage du téléphone portable quand on refuse l’installation d’une antenne ? — semble nous emmener dans un monde parallèle. Enfin, le recours à la poésie d’Anjela Duval, poétesse bretonne apprise dans les écoles, la douceur des échanges entre Jakez, le gentil grand-père, et les petits enfants, nous entraînent juste à la marge de notre monde stressé et violent. Tous ces éléments font de ce petit film une ellipse onirique.

Le film peut être projeté, en présence de la réalisatrice, en Bretagne (ou au-delà sur demande) et est disponible en DVD auprès de contact@titaprod.com