Publié le Vendredi 14 janvier 2022 à 13h00.

« C’est la première fois qu’on a un mouvement de grève reconductible à la Fnac Saint-Lazare »

Entretien. Les conditions de travail des salariéEs de la Fnac se dégradent de plus en plus : multiplication des tâches, manque d’effectifs, salaires insuffisants. Dans ce contexte, un mouvement de grève a été lancé à la Fnac de Saint-Lazare, qui dure depuis le 8 décembre, et s’étend aux autres magasins. Glareh, déléguée du personnel et syndicaliste CGT, revient avec nous sur les revendications des grévistes, les discussions en cours et les mobilisations à venir. Entretien réalisé le 6 janvier.

Est-ce que tu peux te présenter pour commencer ? Et nous expliquer quand et comment à commencé cette grève ?

Oui bien sûr. Je travaille à la Fnac, depuis longtemps maintenant, je suis caissière et représentante du personnel au CSE à la CGT.

La grève a commencé le 8 décembre 2021. Les revendications ne sont pas nouvelles, dans le sens ou cela fait des années qu’on fait, ponctuellement, des journées de grèves pour les mêmes motifs sans obtenir gain de cause. Mais cette fois on est arrivé à un tel point dans la dégradation de nos conditions de travail que le 8 décembre, la grève à commencé, et puis elle a été reconduite. Depuis, chaque jour nous nous rassemblons pour voter pour continuer la grève, et surtout ne rien lâcher parce qu’en face la direction à décidé de ne rien lâcher sur nos revendications !

Et vous avez même tenu la grève le jour du 24 décembre, ce qui est un geste très fort pour un magasin comme la Fnac, en terme économique et symbolique.

Oui ! Mais c’est d’ailleurs la première fois qu’on a un mouvement reconductible à la Fnac Saint-Lazare ! Il y en avait déjà eu un aux Champs-Élysées mais jamais encore chez nous. C’est historique.

Quelles sont les revendications principales ?

La première revendication c’est les effectifs, les embauches. Parce que les charges de travail augmentent tandis que les effectifs diminuent. Pour nous ça devient insupportable, physiquement et moralement. Ça n’est plus possible de tenir… Ça a commencé chez les libraires, qui en sont arrivés à un point d’épuisement tel qu’ils et elles ont finit par dire stop. On est arrivé à un point où il est très compliqué d’exercer son métier dans de bonnes conditions. Et les libraires ont donc été rapidement suivis par les disquaires, les gens de la vidéo, du service après-vente qui ne peuvent par exemple pas prendre de pauses certains jours faute d’être assez nombreux ! Alors ils pouvaient le faire légalement, mais de fait ils refusent de laisser leurs collègues seulEs dans de telles conditions au comptoir avec une queue qui ne s’arrête jamais… Voilà ou on est à la Fnac aujourd’hui.

Est-ce qu’il y a eu des rencontres de négociation avec la direction ? Est-ce que ça bouge un peu de leur côté ?

On a rencontré la direction concernant les effectifs « librairie », et ils nous disent qu’ils « vont voir ». En réalité ils ne s’avancent sur rien. Sur les revendications des autres services ils ne veulent rien entendre. Concernant la prime covid — c’est aussi une de nos revendications — la grande direction Fnac-Darty la refuse aux salariéEs sans même donner de justification. C’est juste non. Il faut savoir que certains magasins ont été fermés sur certaines périodes, mais d’autres étaient complètement ouverts en continu depuis la fin du premier confinement (du mois de mai), comme c’est le cas ici à Saint-Lazare. Alors que le covid et ces conditions rendent très difficile pour nous de venir travailler. Il existe également la peur de venir travailler, au risque d’être contaminé par le covid et le transmettre à leur famille…

Le mouvement a commencé à Saint-Lazare, mais s’est élargi à d’autres magasins. Vous en êtes où à l’étape actuelle ?

Oui c’est notamment le 23 décembre qui a été la grosse journée d’élargissement, et aussi la semaine dernière où il y a eu un gros rassemblement et où d’autres magasins ont rejoint le mouvement. On essaie de construire petit à petit le mouvement également sur chaque magasin mais ce n’est pas forcément évident. C’est aussi « grâce à » — ou plutôt à cause de — la réforme du CSE qu’on a moins de représentants du personnel ; donc c’est pas toujours facile mais on essaie malgré tout de faire quelque chose !

Parce qu’en effet les conditions sont à peu près les mêmes partout en France. D’ailleurs ça avait bougé le 24 décembre dans beaucoup de Fnac sur tout le territoire.

En ce moment on observe beaucoup de mobilisations dans le secteur du commerce, au niveau local. Ici il y a une coordination qui se fait entre les différentes Fnac de France. Mais existe-t-il un cadre qui essaye de lier au delà des enseignes particulières ?

On est en lien via notre organisation syndicale la CGT avec Monoprix, Printemps, mais c’est toujours compliqué de converger concrètement. On le sait malheureusement tous, même si on essaye. Donc pour l’instant on essaie déjà de faire exister ça et peut-être à long terme de voir ce qu’on pourrait faire tous ensemble.

Et en perspective il y a d’autres rendez-vous à venir ?

On a fait une demande de rencontre à la direction mais on attend encore, on n’a pas eu de réponse. Ils étaient censés revenir vers nous avant la mi-janvier mais toujours rien…

Vous attendez…

Ouais, on attend, mais on est en action aussi en attendant ! Il y a un rendez-vous hebdomadaire. Nous on est en grève d’autres jours pendant la semaine mais on essaye de donner un grand rendez-vous dans la semaine, avec appel à soutien. Là c’est aujourd’hui, et la semaine prochaine normalement c’est le 14 janvier… à moins qu’on ait obtenu toutes nos ­revendications d’ici là !

Propos recueillis par Diego Moustaki

Pour soutenir les grévistes, on peut verser à la caisse de grève.