Depuis quelques années, des chercheurs étudient scientifiquement l’hypothèse d’une ouverture des frontières. Leurs travaux invalident les idées fausses propagées par les médias dominants et les responsables politiques.
→ Il n’y a pas d’afflux massif
Les chiffres paraissent impressionnants. Le Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) parle de 400 000 réfugiéEs venant en Europe par an pour cette année, et 450 000 l’année prochaine. Rapporté à la population européenne, cela fait moins de 0,1 % ! 9 réfugiéEs sur 10, au sens du HCR (bénéficiant du statut de réfugiés, demandeurs d’asile ou déplacés), sont accueillis dans les pays moins riches économiquement et non en Europe. Les pays qui abritent le plus de réfugiés depuis 1990 sont la Turquie, la Jordanie et le Liban. Contrairement aux idées reçues, plus de la moitié des migrants dans le monde se déplacent entre du nord vers le sud.
→ Il y a peu de migrant-E-s en France
La France terre d’accueil ? C’est un mythe. Quel que soit leur statut, 200 000 migrantEs arrivent en France chaque année... et 60 000 repartent. Si on rapporte ce chiffre à la population, la proportion est la plus faible d’Europe selon le gouvernement lui-même ! De même en ce qui concerne les réfugiés : la France compte 46 réfugiéEs pour 10 000 habitants, l’Allemagne 56, la Suède 233 et la Lettonie 1 322 !
→ L’immigration n’est pas un coût
Selon un rapport commandé par Sarkozy alors qu’il était président, la contribution nette au budget de l’État des immigrés était positive de 12 milliards d’euros en 2005. Un autre rapport cherchant à contester ce résultat aboutissait à une contribution légèrement négative... parce qu’il intégrait le coût du contrôle de l’immigration ! La régularisation de tous les sans-papiers actuellement en France, dont beaucoup travaillent au noir, augmenterait ces ressources notamment par le biais des cotisations patronales. Cela supprimerait aussi la pression à la baisse sur les salaires et les conditions de travail qui pèsent sur tous les travailleurs, notamment dans la restauration, le bâtiment, le nettoyage et le gardiennage. Un économiste libéral, Michael Clemens, a conclu de ses études en 2011 dans le Journal of Economic Perspectives qu’une « ouverture totale des frontières augmenterait considérablement le produit intérieur brut mondial. »
→ Loger tout le monde est possible
Le mal-logement explose en France, développant l’idée qu’accueillir les migrantEs se fera au détriment des plus pauvres. Mais une étude de deux journalistes a montré que l’État et les administrations possèdent 11 millions de m2 de logements, bureaux, casernes vacants ! La Fondation Abbé Pierre estime elle à 2,6 millions le nombre de logements vides en France sachant qu’il y a 1,8 million de demandes. Et la possibilité de réquisition des logements vides existe dans la loi.
→ Les réfugié-E-s et les sans-papiers sont des migrant-E-s
Il y aurait des réfugiéEs qui fuient la guerre et des migrants « économiques » qui viendraient profiter de « nos » richesses. Il faudrait donc accueillir les premiers et expulser les seconds. C’est oublier que ce sont les mêmes politiques de domination économique et militaire qui engendrent la misère et la guerre, les deux se combinant comme on l’a vu au Mali ou en Côte d’Ivoire. Mourir sous une bombe ou mourir de faim, c’est toujours mourir. De plus, la grande majorité des réfugiéEs d’aujourd’hui seront des déboutés du droit d’asile demain... et donc des sans-papiers. Pour 5 demandeurs d’asile, entre 3 et 4 seront déboutés à l’issue du processus.
→ Le PS n’accueille pas, il trie
Accueillir, c’est donner les conditions de pouvoir vivre à égalité. Cela suppose de donner les droits égaux aux autres habitants. Sous la pression, les autorités et le PS prétendent aujourd’hui accueillir les migrants. Mais la chasse aux sans-papiers continue et la loi en cours va précariser tous les étrangers. Quant aux réfugiés, la politique actuelle consiste à en héberger provisoirement pour sélectionner entre ceux qui pourront demander le statut de réfugié et ceux qui seront remis à la rue ou expulsés.
→ L’appel d’air est un mythe
Ce mythe ne repose sur aucune donnée. Catherine Wihtol de Wenden indique que cet appel d’air ne s’est jamais produit dans des pays aux conditions sociales et d’asile très développées comme la Suède ou le Danemark. Idem au sein de l’Europe avec l’ouverture de l’Union européenne à l’est. Depuis quelques années, des chercheurs du monde entier ont commencé à étudier l’hypothèse d’une ouverture des frontières. Leurs projections sur 25 ans invalident le mythe d’un afflux massif vers l’Europe sur la base notamment de ce qu’ils appellent une migration pendulaire faite d’allers-retours et l’augmentation des flux à l’échelle régionale, c’est-à-dire entre pays voisins.
Contre une société qui dresse les unEs contre les autres, qui renforce les frontières et toutes les mesures policières de contrôle et de surveillance de la population, nous défendons l’accueil inconditionnel des migrants, l’ouverture des frontières, la régularisation de tous les sans-papiers, la liberté de circulation et d’installation, la réquisition des logements vides, la fin des interventions militaires et l’annulation de la dette des pays du sud et des traités de libre-échange.
Denis Godard