Publié le Vendredi 28 mars 2014 à 07h49.

Immigration : Valls en remet une couche

Tandis que la campagne des élections municipales battait son plein et que les bateleurs de la politique s’agitaient sous le regard désabusé d’une part croissante de la population, exposée au flux continu d’affaires dans lesquelles le grotesque le dispute au nauséabond, le gouvernement travaillait ! Chacun à son poste. Le ministre de l’Intérieur s’acquittait avec conviction de l’une des tâches qui lui est confiée et qui tend à devenir son hobby : la traque des étrangers en situation irrégulière.

C’est cette fois avec une discrétion inaccoutumée, sans même la publier au Journal officiel, qu’il vient d’adresser à ses services, via les préfets, une circulaire par laquelle il passe encore une vitesse en la matière. Car, depuis qu’il a remis en vigueur la politique du chiffre qu’il dénonçait naguère (tout en lui opposant bizarrement l’exigence de « résultats »), cela confine à l’obsession : il lui faut pouvoir dire qu’il fait mieux que ses illustres prédécesseurs.C’est ainsi qu’il note que « le nombre de retours contraints hors Union européenne s’est établi à 4 676, soit une hausse de 13 % par rapport à 2012 (année pour une part guéanto-sarkozienne), même si ce nombre en valeur absolue demeure faible » (on sera sensible à la pointe de regret qui annonce la suite). Mais il y a au moins un point sur lequel il laisse transparaître sa joie : « Le niveau total des éloignements forcés atteint son plus haut niveau depuis 2006. » Rendez-vous compte : mieux que ce qui n’a jamais été fait sous le règne de Nicolas !

Des « résultats encourageants » !Mais foin de triomphalisme ! C’est tout à fait sobrement qu’il en conclut : « Ces résultats, encourageants sont la traduction de votre mobilisation qui devra se poursuivre tout au long de l’année 2014. » Suit la feuille de route qui évoque notamment « une présence effective des forces de l’ordre pour effectuer les contrôles d’identité et les interpellations nécessaires ». Parce que ce n’était pas le cas ? Bonjour la multi­plication des contrôles au faciès !Et puisque l’objectif principal est celui d’une plus grande efficacité dans l’application des obligations de quitter le territoire français (OQTF), les services sont invités à « solliciter de façon plus déterminée l’obtention de laisser-passer consulaires », cela afin de « privilégier la voie de l’éloignement (de l’étranger) vers son pays d’origine » par rapport à la réadmission dans un autre pays de l’UE. Pas besoin d’un dessin pour comprendre ce que cela signifie pour les réfugiés politiques, d’autant que l’accent est également mis sur la reconduite systématique des déboutés du droit d’asile. Pour faire bonne mesure, le ministre indique que « le bénéfice des dispositions prévoyant que toute personne sans abri en situation de détresse médicale, psychique et sociale a accès, à tout moment, à un dispositif d’hébergement d’urgence » ne saurait être accordé au demandeur d’asile qui a épuisé ses voies de recours, ce qui est juridiquement très contestable.On pourrait continuer à détailler les infamies que contient cette circulaire et s’attarder sur ses conséquences, comme le fait RESF qui, évoquant une précédente circulaire scélérate d’il y a tout juste un an, propose de faire du 11 mars la « journée de la brute ». Il conviendrait alors de rappeler que « la brute » n’est jamais que l’exécutant zélé de la politique du gouvernement.

François Brun