Publié le Jeudi 30 avril 2009 à 14h43.

Lampédusa, la porte du refus....

Lampedusa, île "italienne" au large de la Tunisie, 25 km², 5000 habitants, une militarisation extrême. Cette porte de l' Europe voit approcher de ses côtes des bateaux de migrants en provenance pour la plupart de Lybie, chassés de leur pays d'origine par les conflits ou la misère; ainsi en est il des Somaliens, Ethiopiens, Soudanais et Tunisiens, souvent originaires de la région sinistrée et férocement réprimée du Bassin Minier. 

Les politiques européennes de contrôle de l'immigration de plus en plus drastiques contraignent les migrants à emprunter des chemins de plus en plus longs et dangereux: nombre d'entre eux périssent en mer.

Les «interceptions» sont pratiquées par la mission Frontex, à laquelle participe la France, résultat des accords bilatéraux entre les 2 rives de la Méditerranée. En effet, les aides de l'UE au développement sont conditionnées à la gestion des flux migratoires des pays du Sud. 

La situation n'a fait que s'aggraver jusqu'au 18 Février, date d'un incendie déclenché dans un contexte de révolte, avec tentatives de suicide, à l'intérieur du centre. La population locale a exprimé sa colère contre la décision, fin janvier 2009, des autorités italiennes d'y établir un Centre d' Identification et d' Expulsion et d'allonger de 3 à 6 mois la durée de  rétention; le tout sur fond de complicité italo tunisienne pour le rapatriement des expulsés. Les provocations avaient débuté avec le blocage des migrants, en violation des conventions internationales qui engagent l'Italie car cela donnait lieu soit à des expulsions collectives, illégales, soit au maintien sur l'île dans des conditions juridiquement inadaptées.

La préfète de l'île confie en off que ce qui se passe à Lampedusa est «anormal». 

Au caractère dégradant des conditions d'accueil (manque d'hygiène, froid, surpopulation) s'ajoute l'illégalité en raison de l'absence d'avocats et de tribunaux sur l'île. 

Le droit d'asile y est perpétuellement bafoué: délais et conditions d'attente non respectés,  droit au recours entravé, accès à la procédure compliqué, sans compter les atteintes aux droits individuels. 

Les ressortissants tunisiens subissent un traitement discriminatoire dû au renforcement de la collaboration entre Italie et Tunisie en vue d'éloignements massifs. Ils affrontent tracasseries, menaces et négation du caractère politique de leur exil. Beaucoup préfèrent ne pas demander l'asile par peur de représailles sur leur famille et d'incarcération à leur retour. Car il existe en Tunisie un délit de sortie ou tentative de sortie illégale du territoire! 

Le parlement ayant rejeté la prolongation de la rétention, les refugiés doivent être libérés. Le coût de cette libération s'élève à 53 millions d'euros, ce qui signifie l'échec de la politique italienne d'enfermement. 

Le 4 mai doit s'ouvrir à Agrigente le procès de 7 pêcheurs inculpés de «favoriser l'immigration clandestine» pour avoir sauvé la vie de migrants en mer.

Le message est indécemment clair: l'Europe préfère laisser mourir que laisser entrer. 

Il est vital de saisir l'opportunité des élections européennes pour mettre la protection des droits des réfugiés au coeur de la réflexion.