Publié le Dimanche 23 octobre 2022 à 11h40.

Un projet d’accueil de réfugiés porté par la municipalité divers gauche de Callac affole les fachos français et bretons.

Plutôt que de grandes tirades générales, notre comité se propose de présenter à travers notre journal « l’Anticapitaliste » une rétrospective de deux mois d’agitation orchestrée par l’extrême droite et principalement le parti de Zemmour : Reconquête.

Callac est le chef lieu du canton éponyme situé à mi-distance de Guingamp et Carhaix au centre ouest Bretagne. Zone essentiellement agricole dont les quelques industries ont été laminés par la concentration capitaliste.Tout le monde à en mémoire le conflit des Bonnets rouges avec la fermeture de deux sites industriels à proximité dans le  Finistère voisin : l’abattoir Tilly de Guerlesquin et l’usine de saumon Marine Harvest de Poullaouen.

De nombreux salariés venaient du secteur de Callac. Toutes ces suppressions d’emploi ont accentué l’exode rural et dévitalisé un peu plus la région.

La nouvelle municipalité de gauche qui avait réussi à reprendre la mairie à la droite, après sa perte par le PCF, a sans doute voulu à travers un projet d’accueil de familles de réfugiés, en situation régulière, résoudre deux équations : faire une opération urbanistisque en restructurant une ancienne école à l’abandon, potentiellement dangereuse, et attirer des résidents plus jeunes pour doper la démographie, sauver des classes.

Une fondation privée, dont le rôle n’est pas très net vu de l’extérieur, apportait à ce projet « humanitaire» une caution financière de 2 millions d’euros, essentiellement pour le bâti et le suivi social sur le long terme des réfugiés.

Très vite, dès le projet sur la table « des habitants » se sont montés en collectif refusant l’accueil de personnes d’origine étrangère. Mais en mettant le ver dans le fruit, ils ont ouvert, sans y avoir sans doute penser, un espace aux xénophobes. De l’autre côté aussi y a t’il eu une erreur de communication ou une mauvaise prise en compte des enjeux par les élus ?

C’est le sentiment de Jacques un syndicaliste du cru, bon connaisseur de la vie politique locale (à tel point qu’il avait prédit au NPA aux dernières cantonales un score à deux chiffres !...).

Cornaqué par Catherine Blein, une facho exclue du Rassemblement National (sic) pour antisémitisme, et plus récemment par Edwige Vinceleux, ex gilet jaune, ex identitaire et candidate aux législatives pour Zemmour, l’agitation gagne la campagne centre bretonne.

Le 17 septembre dernier, Reconquête mais aussi les « habitants de Callac »  précités organisaient une manifestation contre le projet et demandaient à grand cri un référendum local. Ils réunissaient une nébuleuse identitaire à la fois bretonne et française, parsemée de droite locale volontiers xénophobe. Au total, 200 à 300 personnes.

La riposte antifa ne devait pas tarder, un collectif d’habitants favorable au projet aussitôt rejoint par le CVA 22 et le NPA 22 lançaient une invitation à contre manifester. Le 17 septembre à une encablure du meeting facho, nous nous sommes retrouvés à 500, nettement renforcé par un appoint du Finistère voisin dont le NPA 29 en nombre. Mais aussi VISA 29, la CGT, La FSU 29 etc....

Si le ressenti d’un bon nombre d’entre nous était qu'il y a eu une quasi absence d’organisation du rassemblement, qui du coup fit la part belle aux prises de parole des « élus » institutionnels, sénateurs, députés, il n’en demeure pas moins que  la mobilisation était d’un bon niveau.

On notera dans les prises de parole la position très intéressante du maire de Rostrenen sur le fond du sujet, celle de l’adjointe de Callac qui moucha dans un discours bilingue breton/français le nez des nationalistes d’en face.

Du côté du NPA Côtes d’Armor, nous avons affiché un discours de combat radicalement révolutionnaire et anticapitaliste totalement indépendant du jeu institutionnel.

Depuis le 17 septembre, la presse nationale écrite, numérique et télévisée voire internationale (le New York Times a contacté le NPA…) se rue sur Callac.

Les fachos taguent, menacent de mort le maire, tractent sur les marchés, pétitionnent et font monter l’exaspération d’une population inquiète, peu habituée à de tels clivages alors que sa tradition politique est fortement ancrée à gauche.

 

Le témoignage suivant de Flo nous en dit un peu plus :

«  C'est terrible ce déchaînement sur Callac depuis plusieurs semaines qui dépasse les enjeux d'une petite ville.

Le projet Horizon qui s'englobe dans un projet beaucoup + large des petites villes de demain est récupéré par l'extrême-droite … qui ne savait même pas où se situait Callac sur une carte, les médias ne font pas un travail journalistique de fond et de neutralité, le curseur s'est déplacé au niveau national (reportages TV à gogo) et international (journaux danois, québécois, New York Times).

Certains habitants ont été utilisés (souvent des personnes peu ou pas du tout engagées pour la vie associative, politique), ne maîtrisant pas les enjeux politiques... Certains commencent à sentir le vent tourner ... et font profil bas. Ce déchaînement est usant au quotidien...  les derniers tags sont terribles quand on traverse le village. Derrière tout ça, l'extrême-droite récupère... mais ne propose rien. »

Depuis la situation c’est encore envenimée avec la visite du bras droit de Reconquête, Guillaume Peltier qui est venu expliquer aux bretons - faut en tenir une couche quand même - comment il fallait faire pour rester breton. Rassurez-vous il n’a évidemment pas été capable de nous le dire dans la plus ancienne des langues celtes encore usité sur la terre armoricaine. Le seul mot de breton qu’il connaît doit être "pen" le nom de famille de la Marine…

C’est donc en catimini que ce mercredi 19 octobre, les meneurs de Reconquête ont réservé une salle dans une petite commune voisine de Callac, La Chapelle Neuve. Réservation faite par un notable bien de droite pour un dîner débat.

Le maire de la Chapelle Neuve soit a été abusé mais pas que… soit il a manifesté une certaine distance par rapport à ses voisins callacois. Toujours est il qu’il a, bien que sollicité pour ne pas le faire, y compris par le NPA, maintenu la location pour la venue de Peltier.

Celui-ci a du d’ailleurs se demander dans quelle campagne perdue, 200 habitants, il avait du venir car il affichait à l’horloge un sacré retard.

Par contre de notre côté, il lui a été prouvé que la campagne, nous on la connaît. Et donc le mercredi à 19h00, à l’appel du CVA 22 une bonne centaine de manifestants se regroupait dans le bourg pour faire entendre le refus de sa présence et défendre le principe d’une Bretagne ouverte et solidaire.

 

Témoignage de Jacques, habitant de la Chapelle Neuve :

«  On se doit d’être présent contre le battage fait par l’extrême droite. Nous étions deux habitants de la commune dans le rassemblement, il y avait aussi un maire PCF . Quand j’ai vu la manif partir vers Callac je n’ai pas compris la manœuvre? nous tournions le dos à la salle des fétes! Puis on a pris à travers les champs par un ancien chemin creux pour tourner le dispositif policier. C’était une belle idée... »

 

Témoignage d’Uriell, ancienne candidate du NPA aux cantonales à Callac :

 «  A 19h une centaine de militants étaient présents sur le parking du café restaurant Kerhuel à la Chapelle Neuve pour s'opposer à la venue de Guillaume Peltier, porte parole du parti Reconquête, le parti créé par Eric Zemmour.

Reconquête avait organisé un dîner-débat pour montrer son opposition au projet "Horizon"; projet d'installation de migrants dans des logements de la ville de Callac.

Un barrage de gendarmes était posté à l'entrée du village, il procédait au recensement des plaques d'immatriculations,  de l'identité des personnes se rendant à la manifestation, ainsi qu'à une fouille du coffre des véhicules. Les militants se sont rendus à pied, à travers champs jusqu'au lieu ou se tenait le dîner organisé par Reconquête. Arrivés à une dizaine de mètres de la salle une vingtaine de gendarmes munis de boucliers, de casques et de matraques  nous attendaient  pour nous empêcher d’approcher. Les manifestants ont alors tenté de traverser la barrière, la gendarmerie a vite répliquée sans sommation avec des coups de matraque et du gaz lacrymogène pour faire reculer le cortège, quelques personnes ont été arrêtées.

Les manifestants sont restés à l'arrière de la salle et ont continué à scander des slogans anti-fasciste en musique, une prise de paroles à également eu lieu à l'orée bois à l'aide de lampe frontales et  les yeux irrités par les gaz lacrymogènes. »

Témoignage de Kenny du NPA:

« Suite à l'appel du CVA le NPA 22 comité Nathalie Le Mel, Breizhistance, la CGT, LFI, nous étions environ 120 personnes déterminées pour perturber le dîner débat organisé par le parti reconquête de Zemmour, polémiste financé par Bolloré et la venue du numéro deux du parti Guillaume Peltier. Dans ce cortège, il avait aussi des personnes  de Callac qui soutiennent le projet horizon d'accueil de migrants ainsi que le vétérinaire retraité de Callac. Vers 20h le cortège s'est mis en route aux sons de la fanfare à travers bois et champs pour rejoindre l'arrière de la salle. Arrivés à destination un important cordon de gendarmes mobiles nous attendait. Stop on ne passe pas, sur ces sommations nous avons continuer à avancer, l'ambiance était très électrique. Devant notre détermination après une prise de parole, nous avons insisté pour passer, ils ont commencés à être violent, une personne à même été empoignée et exfiltrée manu militari. Nous les avons copieusement engueulés. « La police protège les fachos ». Sur ce ils ont utilisé des gazeuses, nous avons donc du reculer. Bref un dispositif impressionnant pour protéger environ 180 membres et sympathisants de Reconquête, nous avons préféré en rester là pour qu'il n'y ait pas de blessés. » 

 

Mais l’histoire est loin de voir son épilogue, puisque à nouveau Reconquête annonce un nouveau rassemblement le samedi 5 Novembre à Callac. Avec dans la foulée, la réplique à nouveau autour du CVA 22,  d’une  nouvelle  contre manifestation. 

Le NPA répond présent en ayant la volonté de poser sur la table la nécessité de développer une stratégie prenant en compte les réalités locales et s’appuyant sur une mobilisation déconnectée du calendrier posé par les racistes et les xénophobes.