Publié le Lundi 21 novembre 2016 à 09h21.

La fuite en avant des dirigeants d’EDF

Avec 21 réacteurs nucléaires à l’arrêt sur 58, la presse s’est fait largement écho des « déboires » d’EDF. Les médias mettent l’accent sur les révisions à la baisse des objectifs de production d’EDF et les « risques de pénurie » d’électricité en France, à l’entrée de l’hiver et avant les fêtes de fin d’année. Ce contexte alimente bien sûr la spéculation sur le marché de gros de l’énergie, où le prix du MWheure a atteint 500 euros. Mais ces mêmes médias évitent de parler de l’essentiel : cette situation anormale est le révélateur d’un risque d’accident nucléaire en forte hausse dans notre pays.

De quoi s’agit-il ? L’Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN) juge sérieuses les anomalies de teneur en carbone détectées sur certaines pièces métalliques des générateurs de vapeur (GV) et a demandé à EDF des contrôles approfondis sur 12 réacteurs. Les GV produisent, à partir de la chaleur dégagée par la réaction nucléaire, la vapeur d’eau nécessaire aux turbines produisant l’électricité. La présence de carbone fragilise à terme des éléments qui doivent rester étanches ; leur rupture produirait des rejets radioactifs dans l’environnement. Or les contrôles demandés trainent en longueur et les « arrêts de tranche » se prolongent …

La loi du profit favorise le risque d’accident nucléaire

Le taux de disponibilité des centrales nucléaires d’EDF est aujourd’hui au plus bas. C’est le signe que le « vieillissement » des réacteurs, problème identifié depuis plusieurs années déjà par EDF et les experts du nucléaire, fait son œuvre. Les GV ne sont pas les seuls incriminés : deux éléments clés, non remplaçables mais essentiels à la sécurité, la cuve en inox (où se produit la réaction nucléaire) et l’enceinte de confinement en béton (qui protège l’environnement en cas d’accident) sont aussi des maillons faibles. La réalité est là : conçues pour fonctionner 30 ans (40 ans maxi), les centrales nucléaires françaises - pas forcément les plus anciennes - sont en fin de course. Pire, suite à la dérégulation du marché de l’énergie, EDF est passé en 2004 d’établissement public à Société Anonyme. En bons capitalistes, les PDG d’EDF - Proglio puis Lévy (poulains de Sarkozy puis de Hollande) - ne connaissent que le slogan « nos profits avant leurs vies ». Pour rentabiliser à fond les centrales, ils veulent prolonger leur durée de vie de 40 ans à 60 ans : c’est le projet « grand carénage » (50 milliards d’euros). Profitabilité et acquisitions à l’étranger (achat de British Energy pour 12,7 milliards d’euros) passent avant la sécurité. Les travailleurs des centrales (agents EDF et sous-traitants)  font les frais de cette politique du profit maximum qu’EDF tente d’imposer sous couvert de « sens du service public » : intensification du travail, suppressions de postes (3500 d’ici 2017)…

Du fiasco financier à la catastrophe nucléaire

Mais l’exploitation d’un parc de 58 réacteurs nucléaires, comme la construction d’un 59ème dit de 3ème génération (EPR) à Flamanville et de deux autres à Hinkley Point (Grande Bretagne) s’accommodent mal des critères de gestion d’une vulgaire entreprise capitaliste. En décembre 2015, EDF a dû se retirer du CAC 40 et a fait appel à l’aide de l’Etat (6,5 milliards d’euros). Entre autres pour absorber l’autre N°1 du nucléaire, AREVA, en faillite suite aux comptes truqués par Anne Lauvergeon (nommée par Jospin) ; cette dernière a été mise en examen en mai dernier dans l’affaire UraMin, où 1,8 milliards d’euros sont partis en fumée. Fragilisé financièrement dans ce monopoly, EDF a lancé un plan d’économies. Economies + vieillissement des centrales : les ingrédients d’un accident nucléaire sont réunis. En mars 2011, suite à l’accident de Fukushima, André-Claude Lacoste, président de l’ASN, avait concédé qu’un accident nucléaire majeur ne pouvait pas être exclu en France. Aujourd’hui, c’est malheureusement encore plus probable.

Plus que jamais, face à l’irresponsabilité des nucléocrates, la seule mesure réaliste est l’arrêt du nucléaire. C’est celle que défend le NPA. Cette reconversion devra s’organiser avec les salarié(e)s du nucléaire et s’accompagner, pour sortir du capitalisme, d’un vaste programme public de développement et de déploiement d’unités de production d’énergies renouvelables.

Commission Nationale Ecologie du NPA