Alors qu’on sort d’un été caniculaire qui nous dit l’absolue urgence d’agir contre le réchauffement climatique, le gouvernement adopte son nouveau « plan vélo » pour 2023 à 250 millions d’euros. « Alliance pour le vélo » estime que 2,5 milliards d’euros pour le quinquennat seraient nécessaires.
Les données du problème sont connues et documentées. Les transports, en France, génèrent 30 % des gaz à effet de serre dont la moitié est imputable à l’usage de la voiture. Les montants budgétaires annoncés pour ce plan sont à mettre en regard avec les investissements massifs (plusieurs dizaines de milliards d’euros) dans les 55 projets autoroutiers en cours, tous très contestés. Ce plan n’est en rien une rupture avec le « tout-auto », il va s’appliquer alors que 40 % des immatriculations de voitures sont des SUV, énormes et gros pollueurs. Renault et PSA/Stellantis engrangent des profits, cassent les effectifs, et foncent toujours plus dans l’impasse de la voiture électrique. Les transports collectifs ne sont pas à la hauteur. Les plus précaires doivent consacrer 16 % de leur budget à la voiture.
Le vélo a été très populaire, il doit le redevenir
Quand un trajet du quotidien sur deux est inférieur à 10 km, quand on enregistre un bond de 28 % de la fréquentation des itinéraires vélo en deux ans, quand la conscience des crises écologiques et sanitaires progresse, il est alors temps de prendre le vélo au sérieux. La part modale du vélo (km parcourus à vélo/km parcourus au total tous modes de transport) est inférieure à 5 %. Elle peut aller à 25 ou 30 %. Pour y parvenir, il faut une boussole, une hiérarchie des transports, la marche venant en premier suivie par le vélo, les transports en commun gratuits, les transports de marchandises, la voiture individuelle. L’avion devenant dans cette optique absolument marginal. Et le jet privé étant interdit.
Politique du vélo concrète
Des millions de garages /abris doivent être construits, sûrs, accessibles, gratuits, près des gares, des commerces, des lieux de travail, au bas des immeubles, y compris dans les cités populaires. Il faut plus de pistes cyclables, cohérentes, élaborées avec les utilisateurEs, avec les habitantEs des quartiers, avec l’impératif de ne pas bétonner plus encore. Des ateliers de réparation participatifs doivent être créés et un versement forfaitaire patronal mis en place. Les entreprises et services doivent mettre à disposition des employéEs venant à vélo des vestiaires et des douches ! Pour les livreurs à vélo, le donneur d’ordre doit fournir l’outil de travail, un vélo aux normes. Il faut soutenir les nouveaux usages du vélo qui apparaissent : les vélos-cargos, les vélos-transporteurs d’enfants bien sécurisés, le vélo électrique qui permet d’éviter des trajets en voiture de 10 à 20 km. Tout comme il faut soutenir les expérimentations pour un usage quotidien et pratique du vélo en moyenne montagne.
C’est toute une filière de production historique qui pourra alors se reconstituer. C’est aussi tout l’aménagement du territoire modelé par la voiture qui doit être repensé.
Une révolution culturelle...
Faire en sorte que 15 à 20 millions de personnes utilisent quotidiennement leur vélo, c’est engager une révolution dans les esprits. Et dans les corps… Mais notre politique pour le vélo est loin de tout validisme, le vélo peut être pratiqué en mode inclusif : le vélo électrique a tout son rôle à jouer ici, il se révèle très utile et redonne de la mobilité à de nombreuses personnes atteintes dans leur santé. Ce grand retour du vélo passera aussi par l’école. Par le débat, forcément : quelle société voulons-nous ? Une société du stress et de l’hyper-mobilité et, paradoxalement, de la sédentarité ? De la ronde accélérée de la marchandise, du consumérisme ? Est-il raisonnable de produire la « voiture électrique sans permis, idéale pour vos ados et pas cher pour 7 000 euros » ? D’acheter « la trottinette électrique si conviviale » ? La décroissance des biens matériels, si nécessaire, est à l’opposé de la récession capitaliste avec son cortège de souffrances. Une révolution dans la propriété sera incontournable. Jamais les actionnaires de nos deux constructeurs ne consentiront à sortir du « tout-auto », leur poule aux œufs d’or, et il faudra bien imposer leur expropriation : à nous toutes et tous de décider de la destination des investissements !
Pratiqué dans de bonnes conditions, loin d’être une punition, le vélo est un plaisir.