Publié le Jeudi 12 mai 2011 à 23h17.

Société nucléaire, société policière

Lundi 2 mai, une soixantaine de militantEs de Greenpeace bloquent le chantier EPR de Flamanville à 3 h 30 du matin (voir Tout est à nous ! n° 101). CertainEs s’enchaînent aux grilles, d’autres escaladent trois grues et deux camions sont ancrés dans le sol. Cela va prendre la journée entière aux forces de l’ordre pour déloger tout le monde, et le déblocage s’opère vers 17 heures. Visiblement très énervés, les hommes de la brigade spécialement envoyée n’y vont pas de main morte pour descendre les militants des grues. Résultat : quatre blessés. Après une nuit de garde à vue, seize militants, les grimpeurs, sont déférés devant le parquet et le juge des libertés et de la détention. La procédure est inhabituelle, d’après leur avocat M. Farot, généralement les militants ressortent avec une convocation ultérieure devant le tribunal. Plusieurs chefs d’inculpation sont retenus contre eux : entrave à l’exercice de la liberté de travail, opposition aux travaux d’utilité publique et mise en danger de la vie d’autrui (comprendre : celle des policiers qui ont dû aller chercher les militants dans les grues du chantier). Cette volonté de marquer le coup est peut-être due à la négligence des forces de l’ordre qui ont oublié une militante sur le chantier. En effet cette dernière s’est retrouvée seule sur sa grue, et c’est elle qui a demandé à être descendue, vers 19 heures... Plus sérieusement, on peut s’interroger sur une éventuelle incidence de la réunion organisée par Sarkozy à l’Élysée, le même jour. En guise de bilan sur le Grenelle de l’environnement, ce dernier a eu le cynisme de proposer aux ONG présentes « un Grenelle de l’énergie ». Greenpeace a déclaré cette proposition inacceptable et que, dans le cadre du Grenelle de l’environnement, « les multiples renoncements et volte-face effectués depuis par Nicolas Sarkozy et son gouvernement valent aujourd’hui comme une motion de défiance sur leur capacité à organiser un débat serein et contradictoire et à intégrer ensuite ses conclusions dans le champ politique et institutionnel ». Autre coïncidence, Sarkozy se rend le mardi 3 mai à Gravelines pour renouveler sa confiance dans le nucléaire et scander : « Nous allons continuer à investir dans cette filière. Je refuse de remettre en cause l’indépendance énergétique de la France. Il n’y aura pas de moratoire. » Il continue de se conduire en parfait VRP de l’industrie nucléaire et proclame partout la sécurité de nos centrales. En attendant les militants de Greenpeace ont été remis en liberté sous contrôle judiciaire. Ils ont dû s’acquitter d’une caution de 1 000 euros, et ont pour obligation de pointer chaque semaine au commissariat de leur lieu de domicile. Cerise sur le gâteau : ils sont interdits de territoire bas-normand jusqu’au jugement, qui aura lieu le 16 juin. Est-ce pour les empêcher de participer à une action contre le G8 à Deauville ? En tout cas, le NPA leur renouvelle son soutien.

Nathalie Ménard