Les 5 et 6 novembre, un convoi de onze conteneurs de déchets radioactifs allemands « retraités » parti de La Hague a traversé douze départements français en direction du centre d’enfouissement ultime de Gorleben en Allemagne. C’est la douzième année qu’un tel convoi circule, mais c’est le plus important jamais organisé : sa radioactivité est plus du double de celle émise lors de la catastrophe de Tchernobyl. Si en France, la mobilisation n’est pas passée inaperçue, elle est restée limitée. En face, des moyens énormes sont mis au service d’Areva, tant en personnel SNCF que policier. L’opacité est de mise, les élus des communes traversées ne sont pas mis au courant du passage de ce convoi à haut risque, le trajet change au dernier moment pour contourner les nœuds de contestation. En Allemagne, la mobilisation antinucléaire est d’une toute autre ampleur. Le gouvernement Merkel veut revenir sur l’engagement de sortie du nucléaire de l’ancienne coalition rose et verte. Après les 100 000 manifestants à Berlin en octobre, 50 000 personnes viennent de se rassembler dans la petite ville excentrée de Dannenberg, gare d’arrivée du transport Castor. L’organisation impressionnante des antinucléaires dépasse encore le degré atteint lors du sommet des chefs d’État du G10 d’Heiligendamm en 2008. Les bloqueurs ont imaginé une multitude d’actions, dont la plus spectaculaire est l’enlèvement du ballast soutenant les rails. Des milliers de personnes s’activent dans les prés et les bois bordant la voie ferrée. Les 16 000 policiers mobilisés utilisent tous les moyens pour freiner les antinucléaires : canons à eau, bombes au poivre, matraques, etc., provoquant de nombreux blessés dans les rangs des manifestants. Il s’agit là d’une des mobilisations les plus importantes de ces vingt dernières années. Bien qu’elle déborde souvent le cadre strict de la légalité, cette « résistance citoyenne » trouve un large soutien. Le parti Vert, suppôt de l’ordre établi, veut y trouver l’occasion de se refaire un profil contestataire. L’ensemble des forces de la gauche radicale est là aussi avec la jeunesse lycéenne et étudiante. Avec l’opposition de masse au projet de nouvelle gare à Stuttgart, la renaissance du mouvement antinucléaire est le phare des nouvelles résistances en Allemagne.