Il voudrait à tout prix faire monter le parti néofasciste français qu’il ne s’y prendrait pas autrement... Les scandaleux propos de Macron, mettant dans le même sac le FN et Syriza (voir notre rubrique No comment en page 3), sont une tentative délibérée de créer la confusion politique.
Cette confusion a nécessairement pour effet de diaboliser la politique de Syriza, mais renforce aussi la « dédiabolisation » et la banalisation activement recherchées par le FN. Totalement infondée, la comparaison de Macron ne peut que créer des sympathies pour le FN dans les classes populaires, et accréditer l’idée qu’il constitue une vraie alternative.
Bien évidemment, le FN participe à ce brouillage politico-idéologique. Contribuant à la confusion ambiante dont il pourrait être le principal bénéficiaire, il se réclame bruyamment du résultat du vote du peuple grec au référendum du dimanche 5 juillet. Ainsi Florian Philippot, le vice-président du FN, réagissant au vote du peuple grec : « C’est le début de la fin de la zone euro, on a démontré que l’Union européenne n’est pas irréversible, et c’est la première fois dans l’histoire que cette machine infernale trouve un peuple face à elle soutenue par un gouvernement, pour le plus grand bonheur des peuples. »
Or, à l’évidence – et quoi qu’on en pense par ailleurs, le débat à gauche sur l’attitude vis-à-vis de l’euro étant ouvert –, ce n’est pas le sens que Syriza souhaitait donner au référendum organisé par le gouvernement Tsipras. Jusqu’ici, la majorité de Syriza (bien que le débat contradictoire sur l’euro existe dans ses rangs !) ne souhaite ni sortir de l’euro ni de l’Union européenne, mais milite pour une autre politique à l’échelle européenne. Et même si une telle position devenait majoritaire à gauche, ce ne serait assurément pas sur les mêmes bases que celles de l’extrême droite, qui combat l’Union européenne parce qu’elle est hostile au principe « supra-national » lui-même.
Sortir ou pas de l’euro ?
Cette question de la sortie de l’euro demeure cependant celle où le FN rencontre encore les difficultés les plus importantes avec une partie de son propre électorat (et avec ses électeurs potentiels). Dans les couches moyennes, chez les petits patrons, chez les retraités plus ou moins aisés, certainEs partagent les « valeurs » réactionnaires du FN… mais s’inquiètent pour leurs avoirs en banques ou leurs pensions en cas de retour à une monnaie nationale. D’autres partis d’extrême droite en Europe rencontrent des problèmes similaires, ce qui a par exemple conduit la Ligue du Nord en Italie à certaines contorsions… pour finir par condamner le référendum grec.
Cherchant à pallier la faiblesse de sa « crédibilité » économique du point de vue patronal, le FN a commencé à développer ses propres réseaux patronaux. C’est surtout autour de Marion Maréchal-Le Pen, la jeune députée du Vaucluse, que cette construction se cristallise. Cela alors que Marine Le Pen et Philippot avaient ces dernières années axé leurs discours essentiellement sur une démagogie sociale à tonalité antilibérale.
Jeudi 2 juillet, France 2 a présenté un reportage montrant une réunion comptant une centaine d’invitéEs – patronaux et pro-FN – dans le jardin d’une discothèque à Lyon : « Des patrons qui s’affichent au FN, une nouveauté »... La chaîne rappelait que 7 % des candidats aux départementales de mars 2015 avaient le statut de chef d’entreprise… contre 4 % à l’UDI, 3 % à l’UMP et 1 % au PS. Mais la sortie de l’euro reste toujours un sujet de controverse entre le parti et la majorité du patronat.
Bertold du Ryon