Publié le Mercredi 18 janvier 2017 à 10h11.

Hausse des dépenses militaires : Attention danger !

Depuis la chute du bloc soviétique, la part des dépenses militaires (dans le PIB ou dans les budgets publics) avait chuté dans le monde, surtout dans la décennie 1990...

Aux États-Unis, les dépenses militaires représentaient environ 6 % du PIB dans la phase terminale de la guerre froide dans les années 1980 sous Reagan. Elles ont ensuite chuté à 2,9 % en 2000. Après le 11 septembre 2001, les États-Unis se sont réarmés (4,6 % du PIB en 2009), puis ces dépenses ont à nouveau baissé avec la crise (3,3 % en 2015).

En France, le budget de la défense a diminué de 20 % depuis 25 ans et les dépenses militaires représentent dorénavant 2,1 % du PIB (contre 4 % dans les années 1980).

En progression, mais pas partout

Depuis 2015, les dépenses mondiales d’armement progressent (+ 1 % en 2016), mais de façon différenciée : elles stagnent dans les vieux pays impérialistes, alors qu’elles progressent fortement dans les pays « émergents » d’Asie qui connaissent une forte croissance, ainsi qu’en Europe de l’Est et au Moyen-Orient. 

Les États-Unis réalisent 40 % des dépenses militaires mondiales. Leur part dans le PIB diminue, mais cela pourrait changer radicalement avec Trump... En Europe, les dépenses militaires allemandes devraient augmenter de 7 milliards entre 2011 et 2020, contre 3 milliards pour la France. En outre, les déclarations de Trump considérant que les États-Unis payaient trop pour la défense de ses alliés pourraient pousser les dépenses européennes à la hausse.

Mais c’est surtout en Asie que les dépenses militaires explosent. La Chine a augmenté ses dépenses militaires de 130 % au cours des dix dernières années. L’Inde vient de voter un budget militaire en hausse de 8 % et est dorénavant devant la Russie et l’Arabie saoudite, numéro 3 derrière les États-Unis et la Chine. En Inde et en Chine, la part des dépenses militaires est stable dans leur PIB (autour de 2 %), et c’est donc leur forte croissance qui leur permet de développer leur arsenal militaire. Au Japon, malgré la dépression économique, le budget de la défense est en hausse en 2017 pour la cinquième année consécutive (+ 1,4 %) sous l’impulsion du Premier ministre nationaliste Shinzo Abe. Le budget militaire dépasse désormais 1 % du PIB.

En revanche, la Russie et l’Arabie saoudite (après les avoir doublées en dix ans) diminuent leurs dépenses militaires : la chute des prix du ­pétrole y est pour beaucoup.

Vers une montée des tensions ?

La hausse des dépenses militaires est évidemment une bonne nouvelle pour les capitalistes de l’armement qui vivent des commandes publiques. Mais elles sont globalement une « charge » puisqu’elles se font au détriment de la production de biens d’investissement qui permettent un élargissement de la production.

Alors que l’armée est au service de la classe dominante, l’enjeu pour les capitalistes est que les travailleurs financent ce surcroît de dépenses d’armement. C’est largement ce qui se passe : la hausse des prélèvements pèse avant tout sur les ménages salariés pour des dépenses d’État qui profitent toujours plus aux capitalistes, alors que les dépenses sociales sont bloquées.

Dans un capitalisme en crise, la hausse des dépenses militaires des puissances « émergentes » et les annonces de Trump laissent augurer une montée des tensions. La Chine ou l’Inde veulent se donner les moyens d’avoir des prétentions politiques à la hauteur de leur puissance économique, et les États-Unis sont déterminés à conserver leur hégémonie malgré leur affaiblissement économique. Cette configuration est porteuse à moyen terme de conflits militaires, et les armes produites n’ont pas forcément vocation à seulement impressionner l’adversaire.

Ce système devient de plus en plus barbare : il impose non seulement des politiques d’austérité de plus en plus dures, mais désormais également une hausse des dépenses les plus nuisibles pour l’humanité. Combattre pour le détruire et le remplacer par un système où les travailleurs seront aux commandes est plus que jamais nécessaire.

Gaston Lefranc