Mardi 26 avril, s’est ouvert au Luxembourg le procès des deux lanceurs d’alerte et du journaliste à l’origine de « LuxLeaks », le scandale ayant démontré que le pays avait accordé de juteux avantages fiscaux aux entreprises. Apple, Amazon, Ikea, McDonald’s ou BNP-Paribas bénéficiaient ainsi d’accords exorbitants leur permettant de payer un montant d’impôt ridicule sur leurs bénéfices. Parmi les inculpés, Antoine Deltour, un Français, ancien employé du géant du conseil PriceWaterhouseCoopers (PwC) au Luxembourg, a copié quelque 28 000 documents décrivant près de 350 de ces accords fiscaux, cela avant de démissionner de son poste en 2010.
Deltour assume son geste et n’en a pas tiré le moindre bénéfice financier. Roger Hayard, le commissaire de police luxembourgeois qui a mené l’enquête, l’a dénoncé comme « anticapitaliste »... s’appuyant sur des commentaires Facebook où Antoine Deltour semblait « avoir du mal à accepter » que le « commun des mortels » paye des impôts alors que les grandes entreprises s’en dispensent largement. De plus, il avait des lectures suspectes puisqu’il était abonné à des listes de diffusion de mouvements écologistes et « suivait l’actualité » de Mediapart.
On pourrait en rire si Deltour ne risquait pas une condamnation, et éventuellement la prison, ce qui signifierait la perte de son nouvel emploi de fonctionnaire dans l’administration française (donc soumis à l’obligation d’un casier judiciaire vierge). Et pendant ce temps, droite et socialistes du Parlement européen (avec l’appui du FN français) votent une directive sur le secret des affaires qui risque de criminaliser encore un peu plus tous les Deltour.