Publié le Mardi 2 janvier 2018 à 23h28.

Qui sont les vrais fraudeurs ?

La grande affaire macronienne du tournant 2017-2018, c’est le contrôle. Pas celui des fraudeurs fiscaux qui font perdre chaque année 60 à 80 milliards de recettes. Mais celui des chômeurEs et des bénéficiaires du RSA. 

La loi de 2008 avait durci les règles applicables aux chômeurEs, et Pôle emploi avait déjà commencé à renforcer son dispositif de contrôle. Les résultats des contrôles montrent que l’on ne peut rien reprocher à la grande majorité des chômeurEs et qu’une bonne partie des 14 % de « fautifs » (ou prétendus tels) sont inscrits mais pas indemnisés. Mais Macron veut franchir une nouvelle étape en renforçant les règles de contrôle, et en mettant l’accent sur l’« intensité de la recherche d’emploi » par les chômeurEs. Peu importe au gouvernement le décalage entre le nombre d’emplois disponibles et celui des chômeurEs. Peu importe aussi que bon nombre des postes offerts ne sont que des morceaux d’emplois, soit à temps partiel, soit des CDD courts. Il s’agit de dégonfler les listes. Ce gouvernement ne s’attaque pas au chômage, mais aux chômeurEs.

Dans les départements (qui sont responsables du versement de l’allocation), ce sont les allocataires du RSA qui sont soumis à des contrôles supplémentaires. Le nombre de « fraudeurs » détectés est dérisoire par rapport au nombre d’allocataires, et surtout les sommes en jeu sont bien plus faibles que celles que devraient recevoir les personnes qui pourraient avoir droit au RSA mais ne font pas valoir leurs droits, comme l’a monté un rapport récent du Secours catholique, et qui font chaque année économiser à l’État plus de 5 milliards d’euros.

En 2011, un député de droite, Dominique Tian, s’était fait une petite célébrité en dénonçant l’insuffisance de la lutte contre la fraude aux allocations sociales et en appelant à de très fortes sanctions. L’ironie de l’affaire est qu’en 2015 il a été révélé que Tian avait eu 2,5 millions d’euros planqués dans des comptes en Suisse… Ce qui lui a valu de passer au tribunal à la fin de 2017. Lors de l’audience, le 1er décembre, la présidente lui a demandé : « N’y a-t-il pas une forme de schizophrénie à fustiger les petits fraudeurs au RSA et à dissimuler parallèlement des comptes en Suisse ? »

Il ne s’agit pas de schizophrénie mais, fondamentalement, du comportement d’un représentant d’une classe sociale pour qui tout euro versé aux pauvres et aux victimes du capitalisme est un gaspillage. Alors que la baisse des impôts des riches est une bonne chose et la fraude fiscale une forme d’art.