Publié le Jeudi 8 septembre 2016 à 09h22.

Qui veut gagner des milliards ?

Une pantalonnade semble en train de se jouer dans l’Union européenne : la Commission européenne, présidée par un ancien monteur de meccanos d’évasion fiscale, inflige une pénalité de 13 milliards d’euros à Apple au profit de l’Irlande... qui d’abord a refusé cet argent puis réfléchit.

En novembre 2014, Jean-Claude Juncker était président de la Commission depuis quatre jours quand éclate le scandale des « Luxleaks » qui décrivait comment le Luxembourg (dont il avait été Premier ministre pendant 18 ans...) avait favorisé l’évasion fiscale des multinationales. Aujourd’hui, les populations contestent de plus en plus cette logique néolibérale, et la Commission veut donc montrer qu’elle fait quelque chose contre les multinationales.

Dès 1991, Apple avait passé un accord avec l’Irlande lui permettant de ne payer qu’environ 2 % d’impôts par an (voire moins) sur les profits réalisés par deux de ses filiales locales, cela alors que le taux d’imposition officiel des entreprises en Irlande est de 12,5 %. Apple faisait remonter dans ces deux sociétés (qui n’ont ni bâtiment ni employé) la totalité des bénéfices réalisés en Europe et même une partie de ceux effectués en Afrique, au Moyen-Orient et en Inde. Les perdants de l’histoire sont donc aussi des États européens et certains pays peu développés.

En fait, l’Irlande a sans doute accepté de dealer avec Apple car la société y a, par ailleurs, de vraies activités qui emploient 5 000 salariéEs et pour lesquelles elle paye l’impôt sur les sociétés (au taux de 12,5 %, particulièrement bas par rapport aux autres pays). Malgré l’incompréhension de la population et de certains ministres, le gouvernement irlandais refuse les 13 milliards (correspondant à ce qu’Apple aurait dû payer avec le taux officiel)... qui représentent pourtant 23 % de son budget annuel ! Sa principale préoccupation est de continuer à apparaître comme un partenaire fiable des multinationales américaines.

Au-delà des aspects grotesques de cette histoire, on retrouve un cas de figure classique : les puissants utilisent toutes les ficelles pour échapper à l’impôt, avec des gouvernements complices ou qui regardent ailleurs.