Une année complète de salaire pour 35 273 assistantEs d’éducation (surveillantEs), ou 36 857 accompagnantEs d’élève en situation de handicap (AESH), ou bien encore 25 396 professeurEs débutantEs. Ou encore un millier d’écoles rénovées, ou plus de deux millions de tablettes numériques, plus d’un million d’ordinateurs neufs, des millions de livres…
On pourrait faire, en somme, bien des choses dans l’Éducation nationale avec 640 millions d’euros : sans surprise, Blanquer a donc décidé en trois arrêtés pris entre le 24 janvier et le 12 février de... les rendre à l’État.
Cette décision serait en temps normal déjà frappée du sceau de l’incongruité, en cette période de crise sanitaire et sociale dans laquelle l’éducation a un rôle crucial à jouer, elle devient criminelle.
Criminelle, quand partout en France des enfants de la maternelle au lycée se retrouvent parfois à plus de 50 dans la même classe au mépris de tout protocole ou obligés de rester chez eux en raison de l’absence presque totale (et même totale dans certains secteurs) de remplaçantEs dans le premier et le second degré dans de nombreuses académies, même pour une journée.
Criminelle, quand le ministre dit à la radio en toute décontraction que face à la déscolarisation et aux risques psycho-sociaux (risques bien réels et qui méritent une vraie prise en charge), être contaminéE par son enfant « [lui] paraît peu de choses », tandis que partout à plus ou moins grande échelle des familles sont touchées par la maladie et ses conséquences. Au même moment, Blanquer dépense le budget communication (pas en baisse apparemment) dans des coups de com’ minables entre séances de gym tonique à la télé, rugby et autres chansons relayées sur les réseaux sociaux.
Occupé à vanter l’intelligence de son chef (quand il ne traque pas l’improbable ennemi « islamo-gauchiste »), Blanquer ne protège ni les personnels, ni les enfants, ni les familles. Il n’est pas ministre de l’Éducation, il n’est qu’un des sous-fifres du MEDEF, et chacune de ses décisions n’a pour but que de servir un seul camp, celui des capitalistes.
Son départ ne résoudra pas les problèmes que rencontrent au quotidien les travailleurEs du secteur éducatif, mais il les soulagera sans doute dans la période.
Il permettra peut-être pour l'ensemble des personnels (y compris les personnels d'encadrement) de sortir la tête de l'eau, de prendre du recul, et se recentrer sur l'essentiel : l'éducation.
Car il faut être clair : depuis un an, la méthode Blanquer, en l'absence de toute concertation et de toute confiance, aboutit à faire appliquer des protocoles tout en essayant de répondre aux mêmes exigences que les années précédentes. Les tâches administratives, évaluatives et organisationnelles prennent tout le temps et l'esprit…. Au détriment de l'éducatif : plus de temps pour réfléchir à la pédagogie ni à la didactique, plus de temps pour réfléchir aux moyens de réduire les inégalités sociales, des mois de travail sans perspectives claires à moyen et long terme risquent de transformer les enseignantEs en exécutants.
Au lendemain de l'annonce de Macron (une semaine d'« enseignement » à distance, deux semaines de vacances pour toutes les zones puis une reprise « progressive » en « jauges adaptées », une promesse de vaccination pour les personnels sans date précise), les élèves, enseignantEs, et parents le ressentent plus que jamais : une année a été perdue à cause de l'incompétence et de l'obstination de Blanquer.