Le 9 novembre, la ministre de l’Éducation nationale Najat Vallaud-Belkacem a annoncé des mesures pour favoriser la « mixité sociale » dans dix-sept territoires pilotes. Cela s’inscrit pleinement dans la politique éducative de ce gouvernement.
Les réformes des rythmes scolaires dans les écoles, du collège, des programmes et de l’éducation prioritaire, auront pour finalité de créer deux types d’établissements scolaires. La réforme de la mixité annoncée s’inscrit donc pleinement dans la sectorisation de l’éducation. Au lieu de développer une politique cohérente à l’échelle nationale, la ministre renverse la logique, « en partant des territoires […] en amont des politiques publiques ».La politique urbaine et sociale est absente du discours de la ministre. Pourtant, si on prétend vouloir augmenter une mixité dans les établissements scolaires, la première étape serait de refaire à neuf les quartiers populaires, développer les transports en commun, empêcher les licenciements et les bavures policières. Il faudrait mener des actions qui feront que l’on ne puisse plus parler de zones riches et de zones populaires. Bref, une politique qui redistribue les richesses et s’attaque aux oppressions.Concrètement, dans les écoles, nous devons en finir avec la politique dite de l’égalité des chances. En effet, donner les mêmes moyens à tous les jeunes, cela signifie – au mieux – maintenir les inégalités sociales. Ce sont les réformes actuelles qui détricotent davantage la mixité scolaire.
Destruction des cadres nationaux protecteurs
Le cadre national de l’éducation était une protection pour tous les enseignants. Dans ce cadre, la liberté pédagogique pouvait s’exprimer. Une liberté où l’on pouvait contester et réfléchir tous ensemble, jeunes et adultes, aux meilleurs moyens éducatifs pour tous. La « mixité scolaire » du gouvernement va augmenter les hiérarchies intermédiaires, c’est-à-dire un contrôle serré (entre collègues) sur ce qui est enseigné. Cela ira de pair avec une injonction aux résultats (taux de réussite aux évaluations à l’école, au brevet, au baccalauréat et en licence). Ce sont ces chiffres qui dicteront les financements territoriaux.En conséquence, il y aura d’une part les établissements qui amèneront « 50 % d’une classe d’âge à la licence », le nouvel objectif du gouvernement, et, d’autre part les établissements de seconde zone pour l’autre moitié des jeunes. Le tout piloté par des projets éducatifs territoriaux (PEDT) qui s’appuieront sur les inégalités sociales pour renforcer les inégalités scolaires. Grâce à l’assouplissement de la carte scolaire, les parents pourront choisir le type d’établissement qu’ils veulent pour leurs enfants... Mais malheureusement, ce choix ne sera possible que pour les parents bien informés vivant dans des zones « mixtes »...
Raphaël Greggan