Jeudi 12 octobre, les dépêches tombent : Lise, 44 ans, enseignante en mathématiques, est entre la vie et la mort après s’être immolée dans la cour de récréation du lycée Jean-Moulin à Béziers (Hérault). Le lendemain, elle décède des suites de ses brûlures.
C’est le choc et l’émotion chez touTEs les enseignantEs. Le constat est sans appel, c’est dans son établissement que cette professeure s’est donnée la mort. Lise a dit, au moment où son corps s’enflammait : « je le fais pour vous ». Terrible et sans ambiguïté, cette unique phrase révèle toute la souffrance qu’éprouvait cette enseignante sur son lieu de travail. Pourtant le même jour, Luc Chatel refusait d’admettre le lien, avancé par le parquet, entre ce geste de désespoir et son activité professionnelle.
Pire encore, dans une tentative supplémentaire de déni, le ministre de l’Éducation a menti, osant affirmer que Lise était suivie médicalement, pour trouver des explications à son geste autres que celles liées aux difficultés d’exercer sa profession. Indigne, indécent mais classique ! Il s’agit toujours de dédouaner les patrons, les directions, les autorités de tutelle, quand un salarié se suicide sur son lieu de travail.
Et pourtant cela fait des années que les conditions de travail des enseignantEs se dégradent, que la souffrance au travail progresse. Pression de la hiérarchie, application au forceps de réformes contestées et contestables, difficultés d’enseigner au sein d’une école victime de dizaines de milliers de suppressions de postes, non-reconnaissance d’un métier qu’il faut exercer auprès de publics divers, formation au rabais voire supprimée pour les nouveaux professeurEs, tout cela contribue à amplifier le malaise des enseignantEs.
Aujourd’hui il faut inverser la vapeur, exiger de travailler autrement avec du temps pour la concertation, le travail collectif. Cela exige une formation de qualité, d’allouer à l’Éducation nationale les moyens nécessaires pour fonctionner. Cela exige aussi de travailler à un projet émancipateur pour l’école en lien avec touTEs, enseignantEs, parents, élèves, associations d’éducation populaire, projet dans lequel les enseignantEs pourraient exercer leur métier dans un but d’épanouissement partagé. Pour qu’il n’y ait jamais plus d’autres gestes aussi terribles et désespérés, c’est ce combat qu’il faut mener.
Myriam Martin