Publié le Dimanche 28 novembre 2021 à 17h46.

À Nanterre, un mois d’occupation contre la sélection

À l’université de Nanterre, les cas de jeunes sans affectation, laissés sur le carreau par Parcoursup, Ecandidat, Campus France, ont été recensés par les militants de l’UNEF dès le mois de juillet. Plusieurs mois de rassemblements, d’actions et de discussion ont permis l’inscription de plusieurs dizaines de jeunes. A la fin du mois d’octobre, alors que continuaient à se réunir des Assemblées Générales nombreuses de sans-facs et de leurs soutiens, la présidence a rompu les négociations. Le 27 octobre, face à cette situation de blocage, les sans-facs et leurs soutiens ont débuté une action d’occupation des locaux de la présidence qui dure encore aujourd’hui pour exiger l’inscription de 61 étudiants. Entre absence de dialogue et déploiement d’un important dispositif de vigiles privés très coûteux, la présidence de Nanterre refuse de répondre aux revendications et propositions de compromis des sans-facs et de leurs soutiens. 

Cela fait maintenant plus d’un mois que cette occupation est en cours. Elle est la démonstration d’une détermination très importante de la part de ces jeunes dont c’est, pour nombre d’entre eux, la première expérience de mobilisation. Dès les premiers jours, cette action a bénéficié d’un soutien important qui n’a cessé de s’amplifier au travers de motions de soutien de la part de pas moins de 50 structures syndicales, de rassemblements nombreux animés par des étudiants, des syndicalistes, des représentants politiques de EELV au NPA en passant par la FI et une partie du PC, d’une tribune lancée par des personnels de l’éducation du primaire à l’université et signée par plus de 600 personnes et d’un meeting qui a réuni 300 personnes et dont les interventions allaient toutes dans le sens de signifier que la victoire était au bout de cette lutte et que ses enjeux dépassaient le seul cas de Nanterre. 

L’université telle qu’elle évolue aujourd’hui avec augmentation des frais d’inscription et lois et décrets institutionnalisant toujours davantage la sélection, ancrant dans les esprits que cette dernière serait inévitable, se plie aux volontés du patronat. En laissant sur le carreau des étudiants à l’entrée du master ou avec seulement le bac en poche, les modalités d’accès à l’enseignement supérieur préparent une main d’œuvre peu qualifiée et prête à se soumettre à des salaires bas, des conditions de travail dégradées pendant qu’un nombre limité d’étudiants pourront poursuivre des études, parce qu’ils en ont les moyens ou parce qu’ils s’endetteront pour le faire. Dès 2022 une réforme des modalités d’accès aux masters va renforcer la sélection avec la mise en place d’une plateforme nationale de tri de type Parcoursup.

Banderole sur le bâtiment présidentiel

Ce qui se joue actuellement dans la mobilisation des sans-facs c’est à la fois l’inscription de ces étudiants dans la fac et la filière de leur choix mais également la démonstration qu’il est possible de contester ce projet d’université. Contre ce modèle d’université ouverte à une minorité, il faut imposer ce que désire la majorité des étudiants : une université ouverte, critique, émancipatrice.

Le président de l’université, M. Gervais-Lambony, bénéficie de peu de soutiens aujourd’hui. La majorité de ses soutiens font partie du corps enseignant de l’université et semblent avoir oublié qu’ils se sont mobilisés contre Parcoursup en 2018. D’autres sont de fervents défenseurs de la sélection et voient dans la possibilité de victoire de la bataille menée par les sans-facs le risque qu’elle en génère d’autres et donne de l’élan à une mobilisation nationale contre la sélection. Ces soutiens accusent les sans-facs et l’UNEF de s’en prendre injustement à la présidence de Nanterre, élue sur la base de son progressisme et qui brille par une combativité qui se limite strictement à ses écrits universitaires, alors que l’entière responsabilité dans l’absence d’inscription des sans-facs serait celle du gouvernement. Bien entendu le manque de moyens dont souffrent aujourd’hui les universités et les mesures austéritaires que sont la sélection et la hausse des frais d’inscription sont le fruit des politiques menées par le gouvernement, avec une offensive notable pendant la présidence de Macron. Seulement, toute présidence d’université qui vote des budgets austéritaires, qui applique la suppression de droits étudiants et qui refuse d’inscrire des jeunes qui occupent ses locaux parce qu’ils n’ont aujourd’hui d’autre perspective que la poursuite de leurs projets, se fait le relai du gouvernement. Toutes celles et tous ceux qui combattent ce gouvernement devraient aider les sans-facs à gagner car, en effet, une victoire des sans-facs serait une victoire, à son échelle, contre cette sélection sociale qui vise à exclure de l’université les enfants d’ouvriers et un premier pas vers ce mouvement de plus grande ampleur qu’il faudra mener dans les mois à venir contre la sélection.

Pour les aider à tenir donnons à la caisse de solidarité.