Publié le Vendredi 16 octobre 2015 à 23h48.

Affaire TEFAL : plus de 1000 salariés mobilisés pour la relaxe !

Plus de 1000 personnes étaient réunies vendredi 16 octobre devant le palais de justice d’Annecy à l’appel de l’intersyndicale CGT-SUD-FSU-FO-CNT du Ministère du Travail, en soutien à l’inspectrice du travail Laura Pfeiffer et au lanceur d’alerte poursuivis par l’entreprise TEFAL.

Pour mémoire, TEFAL, mécontente de l’inspectrice du travail qui a mis en cause la légalité de son accord 35h, a tenté, sur les conseils de la fédération des patrons de la métallurgie, d’obtenir sa mise à l’écart en intervenant auprès du responsable de l’unité territoriale du 74. Plutôt que de défendre l’indépendance de la fonctionnaire, prévue par la convention 81 de l’organisation internationale du travail, le responsable départemental s’est fait le relais des pressions patronales. Echange de bon procédés : en échange la filiale du groupe Seb acceptait un stagiaire recommandé par le directeur du travail. Cette collusion été révélée par un salarié de l’entreprise, qui a mis la main sur des e-mails démontrant les magouilles entre la direction des ressources humaines de TEFAL, le responsable de l’unité territoriale, la Préfecture et les renseignements généraux, et les a transmis à l’inspectrice qui a alerté les syndicats du Ministère du travail.

Plutôt que de faire profil bas, l’entreprise a opté pour la contre-attaque : traîner le salarié, par ailleurs licencié pour faute lourde, et l’inspectrice devant les tribunaux pour violation du secret professionnel et recel. Non content de donner suite à la plainte de l’entreprise dans un temps record, le procureur en charge du dossier a pris ouvertement position pour TEFAL en déclarant au journal L’Humanité qu’il s’agissait d’une occasion de « faire le ménage » à l’inspection du travail et qu’il était inadmissible que Laura ait transmis ces e-mails à son organisation syndicale. Le procès-verbal dressé par l’inspectrice pour obstacle à ses fonctions ne connaîtra pas le même succès et, deux jours avant l’audience, le procureur classait sans suite un autre procès-verbal pour entrave au CHSCT. Pendant tout ce temps, le ministre du travail (passé ou actuelle) n’a pas dit un mot pour soutenir son agent ou condamner les pressions de TEFAL, pourtant reconnues par le conseil national de l’Inspection du travail.

Le cynisme de l’entreprise, le parti-pris ouvertement pro patronal du procureur et le silence du ministre ont provoqué un tollé au Ministère du travail et dans nombre d’entreprises de la région. Outre les agents de l’inspection du travail, étaient donc présents devant le Palais de Justice les syndicats CGT et FO de TEFAL, les unions départementales CGT et des unions locales de la Haute-Savoie, du Rhône, de l’Ain, des syndicalistes Solidaires de l’Industrie et de la Fonction Publique, des militants de la CNT et des représentants de la CFDT. Après l’entrée de l’inspectrice dans le Tribunal, sous les encouragements et les slogans scandés par tous les présent-e-s, l’après-midi a été ponctuée par des prises de parole, des témoignages de salariés en lutte, tel celui des militants de l’équipementier automobile SNR eux aussi victimes des classements sélectifs du procureur Maillaud, et par une pièce de théâtre au cours de laquelle c’est le procès de Téfal et du ministère qui a été organisé.

Le succès du rassemblement, deux fois plus important que celui du 5 juin lors de la première audience, s’explique évidemment par le contexte social et politique : le combat des salariés d’Air France était dans toutes les têtes et le refrain de « Tomber la chemise » a été repris plusieurs fois au cours du rassemblement. Car l’entente patronat-justice-gouvernement pour réprimer les résistances à l’austérité est aujourd’hui visible bien au-delà de la Haute-Savoie. Le rassemblement cristallisait donc la colère que l’on sent monter chez les salariés et dans les équipes militantes : yaourt jeté sur Macron, Hollande pris à parti par les militants de STX…

Intervenant pour le NPA, parmi d’autres responsables politiques venus apporter leur soutien, Philippe Poutou a souligné le caractère systématique de la répression dans la période actuelle et a insisté sur la nécessité de traduire cette colère montante en mobilisations, de préparer une riposte unitaire en dépassant les clivages entre syndicats, partis et associations. A noter également l’intervention du représentant d’EE-LV, qui a indiqué que la motion de soutien à l’Inspectrice et au lanceur d’alerte proposée par son groupe et le Front de Gauche au Conseil Régional Rhône-Alpes a été rejetée conjointement par Les Républicains, le FN et le PS !

A l’audience, le procureur a notamment requis à l’encontre de l’inspectrice une amende de 5000 euros et l’inscription de la condamnation au bulletin 2 du casier judiciaire, ce qui pourrait impliquer le cas échéant sa radiation de la fonction publique.

L’issue du procès n’est pas encore connue mais la détermination de tous les présent-e-s à continuer la mobilisation jusqu’à la relaxe était palpable.

Correspondant