Du jeudi 7 mars au samedi 9 mars, 100 % de la cinquantaine d'ouvriers d'ATE, entreprise de peinture sur avions, ont fait grève à l'appel des syndicats CFDT, FO et CGC.
Ils demandaient que leur santé soit enfin respectée. En effet depuis des décennies aucun investissement sérieux n'a été fait pour l'aspiration des cabines de peinture, alors même que les peintures utilisées contiennent du Chrome 6 hautement cancérigène et mutagène. Suite à des intoxications, une grève avait eu lieu en 2001, entraînant de améliorations sur les équipements individuels mais du bricolage sur le système d'aspiration-ventilation. Depuis, les mises en demeure n'ont pas manqué (2 sont en cours, l'une de la Carsat avec échéance en avril et l'autre de l'Inspection du Travail avec échéance en juin). Les experts estiment que le système d'aspiration est 10 fois inférieur aux normes de l'INRS.
Mais c'est l'ensemble des conditions de travail qui est à revoir : le bâtiment est vétuste, en tôle mal isolée, ce qui entraîne en été une chaleur suffocante, surtout pour les peintres en combinaison étanche ; quant aux grandes portes d'accès pour les avions, elles ne sont pas motorisées ; sans parler du toit qui fuit abondamment quand il pleut... Le seul « investissement » sur ce bâtiment a été une nouvelle peinture sur les façades.... Quant aux lourds échafaudages roulants, leurs roues n'ont jamais été entretenues ni changées, alors même qu'ils sont sans cesse déplacés... avec de plus en plus de difficulté et de risques de basculement. Sans parler du stockage des déchets de diluants et de peinture, dans des barils en plein air sans protection.
Mais cette grève se fait aussi sur fond de baisse continue de la charge de travail : alors qu'il y a deux ans l'usine peignait 4 A320 et 4 ATR par mois, on en est aujourd'hui à 2 ATR par mois. Alors même que les ATR sont plus petits que les A320. Les plans sociaux se succèdent et du chômage partiel est probable pour avril. Les grévistes (dont la plupart dépassent 15 ans d'ancienneté) se questionnent sur la politique de l'entreprise. D'autant plus que le contrat avec ATR a été revu à la baisse.
Bref, les grévistes ont fait face à un patron qui a tiré sur la corde pour faire un maximum de profits et qui se moque bien tant de leur santé que de leur avenir professionnel. Alors il n'était pas question de finir l'avion en cours sans avoir obtenu des garanties.
Mais n'oublions pas la responsabilité du groupe Airbus (ATR est une co-entreprise d'Airbus avec l'italien Leonardo SPA) qui, outre qu'il est propriétaire du bâtiment, a toujours été au courant des conditions déplorables de travail chez ce sous-traitant mais ne lui a rien imposé, si ce n'est des prix bas. Sabena technics, qui a pris plusieurs marchés à ATE, a quant à elle trouvé une autre solution : bâtiments modernes, réglementations environnementales respectées... mais salaires très bas.
Dans les 2 cas, les actionnaires du sous-traitant et ceux d'Airbus se gavent sur le dos des travailleurs.
La détermination des grévistes a payé : vendredi 8 au soir, le directeur général d'ATE s'est engagé sur un calendrier d'investissements dans le système de ventilation-aspiration, et sur des mesures régulières de conformité. Mais il s'est aussi engagé à rendre étanche les bureaux, où on respire sans protection un air très vicié.
Mais l'équipe de Samedi-Dimanche a néanmoins maintenu la grève samedi, pour marquer le coup.
Correspondant