Depuis le déconfinement, pas un jour ne passe sans une annonce de placement en redressement judiciaire ou de restructuration d’entreprises du commerce : ce sont des dizaines de milliers d’emplois qui sont sur la sellette en raison de la fermeture forcée des magasins hors alimentaire ces dernières semaines. Unique raison ? Pas vraiment...Dans l’ameublement, c’est l’enseigne Alinéa, avec 30 magasins et 2 000 salariéEs, qui a ouvert le bal le 16 mai. De son côté, Conforama prévoit, après un précédent plan social l’an dernier, puis s’être vu refuser un prêt garanti par l’État, 1 000 nouvelles suppressions d’emplois sur fond de rapprochement avec But, l’enseigne concurrente.
L’opportunité de la crise du Covid
Dans l’habillement, c’est l’agonie du groupe Vivarte qui n’en finit pas : c’est désormais la cession de son enseigne phare, la Halle, qui est prévue, ce qui va laisser 40 % des 5 000 salariéEs sur le carreau. Même les enseignes qui lui appartenaient auparavant et qui ont été cédées au fur et à mesure des années pour renflouer les dettes générées par un LBO (rachat d’une entreprise par le biais d’une société holding) mis en place en 2007 sont à leur tour dans la tourmente, comme André ou Naf Naf. C’est aussi le cas de Camaïeu, avec près de 6 000 salariéEs et 600 magasins, faute là aussi de prêt.
D’autres branches sont aussi touchées, comme Gibert Joseph, qui va liquider trois librairies en régions, ou PicWicToys, né d’un rapprochement entre deux enseignes de jouets, qui ferme un tiers de ses points de vente. À chaque fois, c’est l’impact de la baisse d’activité liée au coronavirus qui est mis en avant mais aussi celui de la mobilisation sur les retraites, voire les manifestations des Gilets jaunes.
Pourtant, toutes ces entreprises ont eu droit au CICE ces dernières années, transformé depuis en baisse de cotisations sociales pérenne au nom du maintien de l’emploi. Et cette crise est l’occasion d’accélérer la transformation du secteur de la distribution, avec l’essor de la vente en ligne et à emporter, dont le drive est l’expression la plus marquante ces dernières années. Alors que les résistances sont à la peine, compte tenu du faible taux de syndicalisation du secteur et de la dispersion des points de vente, c’est plus que des prêts et du chômage partiel qu’il faudrait pour que les travailleurEs ne soient plus considérés comme une variable d’ajustement, soit un fonds permanent, à l’image de l’AGS (Association pour la gestion du régime d’assurance des créances des salaires), qui garantisse la continuité de l’emploi et donc de la rémunération.