La large couverture médiatique de l’arrestation de Salah Abdeslam suivi de l'émotion provoquée par les attentats de Belgique pourraient faire passer au second plan la poursuite de la mobilisation contre le projet de loi travail.
Pourtant, la forte mobilisation du 9 mars, avec ses centaines de milliers de manifestantEs, a marqué le début d’une bataille décisive contre une loi qui marquerait un terrible retour en arrière pour les droits des travailleurEs.
Un bon départ
Le mercredi 9 mars, bousculées par les centaines de milliers de signataires de la pétition contre la loi El Khomri, la mobilisation des organisations de jeunesse et les appels à la lutte de nombreuses structures syndicales de salariéEs, la CGT, Solidaires, FO, la FSU et même certaines structures CFDT, avaient rejoint les appels des organisation de jeunes. Avec un résultat dépassant les espoirs des militantEs, tant en nombre de manifestantEs que de combativité, de radicalité et de disponibilité pour poursuivre et amplifier la mobilisation.
L’ampleur de la contestation, a imposé au gouvernement sa tentative de déminage. Il a dû ainsi modifier certaines propositions comme le plafonnement des indemnités de licenciement (pourtant qualifié de mesure non négociable par Valls), le travail des apprentis mineurs porté à plus de 10 heures par jour, la possibilité pour les entreprises d’augmenter n’importe comment le temps de travail hebdomadaire. Des mesures qui étaient parmi les plus impopulaires et des modifications qui ont immédiatement permis à la direction de la CFDT d’apporter un soutien sans réserve au projet de loi.
Maintenir la pression
Après cette opération de déminage, la journée du 17 mars, si elle fut moins massive parmi les salariéEs, a été marquée par un début d’ancrage dans la jeunesse, notamment dans les lycées, ainsi que par des tentatives d’intimidation : fermetures de facultés, gazages et arrestations de manifestantEs.
Les objectifs fondamentaux du gouvernement restent inchangés : bousculer la hiérarchie des normes en donnant toute possibilité aux accords d’entreprise de prendre le pas sur les accords de branche et le code du travail, avec la seule préoccupation de satisfaire les intérêts du patronat qui exige toujours plus de flexibilité, de précarité, de possibilité de licencier, d’aggraver les conditions de travail.Comptant sur un climat social et politique marqué par les doutes sur fond d’inquiétudes en relation avec les attentats, le gouvernement, appuyé par des organisations syndicales abusivement qualifiées de « réformistes », espère gagner la bataille de l’opinion ou, en tout cas, désarmer la mobilisation, démotiver les équipes militantes. Les déclarations d’un Gattaz, d’un Macron, sont utilisées pour convaincre que le projet de loi est imposé par la situation économique, et indispensable pour faire reculer le chômage est équilibré.
Plus forte, plus haute, la mobilisation !
Dans cette situation, les organisations, notamment syndicales, qui revendiquent le retrait du projet de loi doivent se montrer plus déterminées, plus offensives. Il n’est pas acceptable qu’à La poste, à la SNCF, dans l’Éducation, des responsables syndicaux refusent d’engager la construction de la mobilisation. Plus globalement, il ne s’agit pas seulement de se déclarer disponible, d’enregistrer les appels de syndicats, d’unions départementales, de fédérations à reconduire la grève au lendemain du 31 mars, il faut en affirmer la nécessité, en avancer la perspective.
La feuille de route est certes plus facile à rédiger qu’à mettre en œuvre. La journée du 24 mars, jour de présentation du projet de loi devant le gouvernement, sera l’occasion de gagner l’élargissement dans la jeunesse, chez les salariéEs, les privéEs d’emploi. Les assemblées dans les facs, les lycées, dans les entreprises, doivent être l’occasion de continuer à démonter la logique infernale du projet de loi, et à débattre des moyens d’en obtenir le retrait, de se rassembler et de manifester partout en France.Le bilan de la mobilisation de 2010 contre la loi sur les retraites, avec des journées de manifestations massives, de grève, « saute-mouton », indique clairement la nécessité impérieuse de hausser le rapport de forces à un tout autre niveau. La grève dans les raffineries menaçant de bloquer l’activité économique du pays avait suscité une riposte répressive à la hauteur de la trouille ainsi provoquée. Ceci nous montre l’objectif à viser, pour le 31 mars... et après.
Robert Pelletier